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Citations sur La littérature de jeunesse : Pour une théorie littéraire (6)

Comme son nom l'indique, a priori "la littérature de jeunesse" se pose comme un genre désignant un public particulier. Elle est une littérature destinée à un public identifié comme jeune. Ainsi, en matière de littérature de jeunesse, la bonne question apparaît très vite comme celle de son destinataire, plus que celle de son origine : non pas "qui a dit ?", mais "pour qui cela est-il dit ?". En ce sens, la littérature de jeunesse ne se reconnaît pas à quelque chose, mais à quelqu'un, le destinataire, ce que souligne, toujours, la construction prépositive : "pour la jeunesse" ou encore "de la jeunesse". L'originalité et la spécificité d'une littérature tiennent ordinairement à une esthétique, à une thématique, à une poétique, mais évidemment pas à un certain type de lecteur affiché dès sa désignation. La littérature de science-fiction, par exemple, désigne immédiatement ses thèmes, et notamment le basculement vers des univers imaginaires. Un texte détermine très tôt un pacte de lecture : un roman est romanesque, un ouvrage documentaire documenté, une poésie poétique... Mais l'expression "littérature de jeunesse" ne désigne rien de ce qu'elle est , de ce qu'elle dit, ni même de la forme générique qu'elle adopte. Elle privilégie un élément extérieur, étranger et hétéronome : le lecteur. Mais cette désignation et cette dénomination, en soi originales, posent plusieurs problèmes...
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Il faut sans soute insister alors sur cet élément : la littérature de jeunesse se destinant à un lecteur par défaut -- soit qui ne sait pas lire, ou qui lit peu ou qui peine à lire ou n'aime pas lire -- a su devenir le lieu d'expériences littéraires, poétiques et artistiques, absolument originales : jeu sur l'image et le support du livre, qui nous a forcé à nous interroger sur les limites de la littérature et du livre même ; jeu sur la lecture, et notamment sur le procédé de double lectorat -- supposant la médiation adulte -- qui permet de repenser l'acte de lecture et remet en question la catégorie sémiologique de "lecteur modèle" ; de même ne saurait-on pas la penser sans un jeu d'architextes, d'archétypes, de mythes et de stéréotypes qui n'ont de cesse que la littérature de jeunesse ne devienne littérature secondarisée, s'évoquant elle-même, se lisant elle-même, dans une sorte de jeu perpétuel de miroir et d'éternel retour sur soi...
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Il y a ainsi en quelque sorte trois espèces de livres d'enfants qui sont tous liés à une certaine idée de l'enfance. Il y a d'abord les livres que les enfants lisent alors qu'ils ne leur étaient pas destinés, comme des livres d'adultes volés pour les plaisirs de l'enfant. C'est là que se tiennent Perrault, La Fontaine et une première littérature de jeunesse informelle. Puis la littérature a cherché dans l'enfance un destinataire explicite, et c'est la grande période d'une littérature de jeunesse gouvernée par la morale et l'éducation. Mais ces livres, très souvent, peuvent être lus sans joie par des enfants contraints. Enfin, une littérature d'enfance et de jeunesse a su concevoir l'enfant pour ce qu'il est et non comme un adulte en devenir, et a su développer, très tardivement – à la fin de la deuxième moitié de XIXème siècle – une poétique et une rhétorique fondées sur un imaginaire proprement enfantin et dont les préoccupations morales et pédagogiques devenaient secondes. La plus récente littérature d'enfance et de jeunesse, forçant cette veine, a pris conscience de ses qualités, de ses mérites.
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La littérature de jeunesse, qui aime les créatures hybrides et étonnantes, s'est laissé contaminer par cette hybridité : elle est d'une part jeu de reconnaissance, mais d'autre part travail expérimental, elle est d'un côté refuge, rémanence et écho, et de l'autre audace, imprudence et création.
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Une question essentielle surgit ici à propos de la littérature de jeunesse : que devient-elle lorsque, justement, elle n'est plus seulement un objet de lecture pour cette jeunesse, mais qu'elle s'expose à une entreprise critique ? La question de la lecture critique en matière de littérature pour la jeunesse est déterminante à deux titres : d'un part, on y pose la question de sa légitimité littéraire ; d'autre part, la lecture critique reste absolument hors de portée des compétences de son lectorat de principe. Est-ce une lecture légitime alors ?
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La simplicité, qui est au principe de cette littérature enfantine, fonctionne comme une "médiation" : alors qu'elle apparaît d'abord comme une contrainte ou comme un obstacle poétique dû à l'incompétence fondamentale et fondatrice de l'enfant, elle devient la clef et le moyen même d'un dépassement vers un monde poétique neuf. Cette simplicité occasionne une oralité et un effort d'expérimentation, qui origine la poétique enfantine dans un fonds d'archétypes remarquables, qui remotive la narration en y mêlant étroitement l'image, et qui permet finalement aux livres de jeunesse d'accéder à la littérature proprement dite.
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