S. S. Murder /
L'Assassin est à bord
Adaptation : M.D.M.
Patrick Quentin, ou
Q. Patrick, c'est la version à deux mains de
Jonathan Stagge. Il a produit quelques bons romans petits romans bien sympathiques mais jamais à la hauteur - en tous cas à mon sens - des romans où interviennent le Dr
Westlake et sa fille, Dawn.
Ainsi, cet "Assassin est à Bord", il est vrai adapté et non pas traduit, est fort plaisant à lire, d'autant que l'auteur a pris comme héroïne principale et narratrice une jeune journaliste, Mary Llewellyn, qui entreprend une croisière vers New-York afin de se reposer des suites d'une opération et consacre son temps libre à tenir une sorte de "journal de bord" destiné à son fiancé. Journal qui finira par atterrir dans le coffre-fort du commandant car l'assassin mystérieux - il y en a bien un - semble fort le convoiter après avoir lu le récit que la jeune femme y fait de la fatale partie de bridge durant laquelle se produit le premier meurtre, celui de Mr Lambert, un riche industriel qui voyage avec sa seconde épouse et sa nièce.
On se laisse bercer par les flots et, en un moment crucial, emporter carrément par une mer plus forte où se trouve propulsée - par les soins de l'assassin Wink , cela va de soi - la nièce en question, Betty. Mort horrible s'il en est, qui ne laisse sur l'océan que le vaste châle orange dont la jeune fille aimait à s'envelopper. Celle de son oncle ne fut pas moins douloureuse : empoisonnement à la strychnine.
De la proue à la poupe, du haut en bas du navire, tout le monde tourne et vire et chacun espère coincer l'assassin décrit, en tout cas tel qu'il est apparu à la fameuse table de bndge, comme très brun, avec des lunettes noires, un menton rasé de près et une expression impassible, doté du patronyme évidemment bidon de Mr Robinson. Or, aucun Robinson, mâle ou femelle, ne figure sur les listes de passagers.
Pour égarer le lecteur,
Patrick Quentin fait jaillir çà et là des personnages disons ambigus comme Mr Burr, qui fait une cour délicate mais sans espoir à la jeune Miss Llewellyn et avec qui elle s'amuse bien, il faut le reconnaître. Il y a aussi Mr Daniels et son accent cockney, qui assista à la partie de bridge : escroc professionnel ou personnage des plus honorables ? Il y a encore Daphne, l'infirmière-dame de compagnie d'une transformiste qui a pris sa retraite mais qui fut jadis une artiste très cotée et qui, ô surprise, n'est autre que la belle-soeur (par le premier mariage de celui-ci) du défunt. Daphne, bien que sympathique et très compétente, possède une carrure hommasse des plus suspectes et son employeur n'a rien perdu ni de son agilité, ni de son habileté à se transformer sur scène, sous les yeux mêmes de son public. Ah ! n'oublions pas le secrétaire de Mr Lambert, le jeune Earnshaw, un presque sosie de l'acteur hollywoodien du muet Ramon Navarro (lequel fut d'ailleurs lui-même assassiné bien des années plus tard) qui, avec la double mort de son patron et de sa nièce, a tout perdu puisqu'il était aussi fiancé à Betty.
Oui, on se laisse mener mais sans grande conviction, avec une paresse certaine. On devine assez vite qui est l'assassin et ... le reste. Mais enfin, on a passé un bon petit moment, et c'est là l'essentiel, non ? ;o)