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Critique de lebelier


Toujours, en lisant Pascal Quignard, on a l'impression de ressortir enrichi, plus intelligent.
Il faut dire que les leçons du maître se font en profondeur, touchent à tous les domaines de la vie, de la mort, de la contemplation, de l'émotion.
Ce qui avait ému M. de Sainte-Colombe chez Marin Marais dans Tous les matins du monde, est ici développé dans une première partie : il s'agit de la mue de la voix lors de l'adolescence des garçons. C'est, à l'instar de Marais, une nouvelle naissance. Quignard explique pourquoi –délaissant l'aspect social et culturel, c'est vrai mais là n'est pas son propos – les hommes dès qu'ils muent, se tournent vers la musique instrumentale, essaient de développer une certaine virtuosité et deviennent compositeurs. C'est ainsi, explique-t-il qu'il y a plus de compositeurs hommes que femmes. Les femmes, aujourd'hui, accédant autant à la culture et aux conservatoires que les hommes, il reste que peu sont compositrices. C'est un constat, pas de la misogynie !

"En Occident, les femmes virtuoses ont fourmillé. Les femmes ont beaucoup aimé la musique. Les femmes qui ont beaucoup composé furent à tout le moins rares. Elles échappent à la mue."

Dans la deuxième partie de ce petit traité, Quignard raconte l'histoire d'Aristote, comment il a inventé la tragédie dont l'étymologie grecque rappelle le « cri du bouc », son de la voix des adolescents qui muent.
Enfin dans la dernière partie, à mon sens la plus fascinante car l'auteur convoque le conte et la légende est l'histoire de T'cheng Lien qui vivait en Chine quelques huit siècles avant Jésus Christ et de son maître Po Ya. Là encore on retrouve un épisode de Tous les matins du monde car Po Ya incite T'cheng Lien à retrouver l'émotion musicale en brisant d'abord un précieux instrument. Quête de la mue perdue encore :

"La musique ne réside pas dans les plus beaux instruments. Elle ne réside pas davantage dans les pires. Les instruments de musique les plus appropriés à la musique sont ceux qui touchent sans doute, mais dont on peut perdre l'usage, comme les corps qui enveloppent les hommes."

Et toujours, on assiste à un exposé brillant, on nous raconte de belles histoires qu'on situe dans le temps qui devient notre temps. Et je ne m'interroge plus quand je vois le nombre d'adolescents –dont je fus – qui, à 14 ou 15 ans , s'emparent d'une guitare ou d'autres instruments et se regroupent pour composer.
La musique est donc devenue la quête d'un âge d'or vocal perdu.

"Enfin la fin de l'orage ne vous rapproche pas de la musique. Votre oreille est peureuse. La musique n'est pas la fin de l'orage, elle est l'orage."



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