Les lointains sont en nous il suffit d’oublier
Immenses et paisibles les rideaux du temps
Les tambours sauvages les trop vieilles guitares
Il suffit d’ouvrir cette porte en soi pour entrevoir
Nos lieux-dits nos secrets sentiers et toute chose
Soudain est là bien à sa place les pas étaient donc
D’avance ici tracés les tilleuls en juillet nos villages
Les fenêtres à grille qui donnent sur les prés
Poussières d’étoiles
Tout s’est passé là-bas à hauteur d’arbres
Les années fuyaient en tout sens
Le temps nous avait oubliés.
Il aurait suffi d’un seul regard
Et le mot à mot du crépuscule
Aurait tinté à nos oreilles.
Nous aurions eu l’âme pleine d’oiseaux sauvages
Et de falaises
De villages de sentiers.
Il y a tant de choses que nous ne savions pas
Il aurait suffi d’écouter en soi
Le dialogue de l’aube et des voix.
Et cette musique des appels nocturnes
Le parler des feuillages des cuivres et des automnes.
Nous n’étions rien que poussières d’étoiles
Rien de plus que cela
La cour aux tilleuls
Exploration
De pas s’éloignent comme
Des lumières dans ma nuit.
Voici que s’ouvre
La porte des mots
Ce sont des façons de voyage
Au plus profond de soi
Pour remonter le temps
Jusqu’au château des contes
Où personnes
Ne viendra plus.
Sauf vous qui m’êtes proche
Au vaste champ des chimères
Ce minuit nu
Comme la voix.
p.48
ILS BRUISSENT, LES ARBRES…
Ils bruissent, les arbres ce sont crécelles
De feuillages et d'écorces vives.
Et quelquefois cela crépité comme un brasier.
Ici reposent les dieux assis sur les gradins
Ensanglantés des monts tout éclaboussés
De mouches de rossignols et d'écharpes.
C'est une ronde sans fin un petit vent
Qu'on entend pas une plainte un gémissement.
Érables en pantalons frênes ormes et rouvres
Ils échangent quelquefois casques et bonnets
Tout badigeonnés de pourpre Et les colchiques
Bleuissent dans les prairies proches
Un horizon de chair peinte s'ouvre
Avec des élégances de vieilles dames
Promises aux solitudes d'octobre.
p.24
Cent mille étoiles nous font signe.
VISAGE PUR (extrait, p. 18)
Très proche quelqu’un vous aurait appelée ou de très loin
Dans les solitudes d’automne et les patrouilles du crépuscule
Depuis ce lieu où s’effacent les brumes et il n’y a
Plus rien que le visage pur de l’Amour.
AVEC LES MOTS (p. 90)
Avec les mots tu ouvres la voie aux migrations
Et c’est un surgissement d’hirondelles de sources
Vives de ronces de mousses de corolles
La neige du temps
RÉSURRECTION
extrait 2
Nous connaîtrons des ruissellements d’aristoloches
[…]
Des cristallisations de volubilis des lectures d’eau morte
Entre estampes et caprices désastres et triomphes
Et les oiseaux qui s’évaporent sous le soleil
Des effondrements de ciels profonds et soudain
Habitables En attendant le colloque des traces
Des coulures les semis des étincelles
Enfin les plus hautes tours Il y aura des matinées
Heureuses au fil des rivières nous saluerons
La patience des heures les dernières glaces
La musique sinueuse des labours et la germination
Enfin d’un éternel sommeil
La neige du temps
RÉSURRECTION
extrait 1
Même le blanc sera couleur nocturne
Nous serons solitaires parmi les ruines
Dans l’attente vaine d’un futur antérieur
Les pages elles-mêmes nous serviront de masques
Têtes sanglantes comme celle du Baptiste et les fenêtres
N’ouvriront plus que sur des horizons fantasques
Nous connaîtrons des ruissellements d’aristoloches
Des vacillements des fanfares
Des élégances de diamant de stèle de menhir
...
"BUCOLIQUE"
Flammes et cendres braises
Sous les pains qui croustillent
Une porte ouverte le volet qui bat :
Maison parmi glaïeuls et fougères.
Toit moussu nuage des lichens
Vieux murs brouillon de lianes
La lumière frappe à la volée
La fleur des vitres qui se fane.
Et l'on entend de très vieux airs
C'était hier ou autrefois
Résonances des ombres des antiennes
Rideau des glycines et des voix.
C'est le miroir du temps qui passe
L'interminable mélodie
Des heures et des jours noués à l'espace
Des fines étoiles de la nuit.
De tout cela qui n'est que songe
C'est la poussière qui perdure
L'ensorcellement du mensonge
Le grand orchestre des aventures.