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EAN : 9782072731952
104 pages
Gallimard (06/07/2017)
4.42/5   6 notes
Résumé :
Mémoire

Les mots sont d'obscurs miroirs
Un jardin négligé avec des gravats des ronces des orties.

Ici la lumière du jour balaie
Des objets furtifs, le faux semblant des souvenirs.

Il y a d'imprudentes randonnées,
Des fenêtres toujours closes, des terrasses
D'où l'on perçoit au loin la mer, on y voyage
La nuit tombée.

[...]
Tout ce désordre des pages, des p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
 
 
Lionel Ray une fois encore se confronte à son enfance,
à la fuite des jours et du temps.

Il développe des Réflexions sur sa place dans le monde
et sur le sens de la vie.

Chez Lionel Ray le noir de son écriture est ébloui,
éblouissant même, par un soleil poétique de tous
instants.


En témoignent les paroles rappelées ci-dessous :


" POUSSIÈRES D'ÉTOILES
Tout s'est passé là-bas à hauteur d'arbres
Les années fuyaient en tous sens
Le temps nous avait oubliés.

Il aurait suffit d'un seul regard
Et le mot à mot du crépuscule
Aurait tinté à nos oreilles.

Nous aurions eu l'âme pleine d'oiseaux sauvages
Et de falaises
De villages de sentiers.

Il y a tant de choses que nous ne savions pas
Il aurait suffit d'écouter en soi
Le dialogue de l'aube et des voix

Et cette musique des appels nocturnes
Le parler des feuillages des cuivres et des automnes

Nous n'étions rien que des poussières d'étoiles
Rien de plus et tout cela.
p.9

" IMPALPABLE

" Et la chronique des Heures disparues
La scintillation des chansons anciennes
Impalpable comme l'horizon du temps
Dans la brume d'une enfance
Au carrefour des échos.

Impalpable comme ce rideau de pluie
Et le balbutiement des agonies
Comme le ciel qui tombe en ruine
Et l'étonnement des blanchisseuses
Et la poussière du souvenir.

Toutes les musiques sont douloureuses
Même la quête éperdue du silence.
p.77

" EXPLORATION
De pas s'éloignent comme
Des lumières dans ma nuit.

Voici que s'ouvre
La porte des mots
Ce sont des façons de voyage
Au plus profond de soi

Pour remonter le temps
Jusqu'au château des contes
Où personnes
Ne viendra plus.
p.48

" BUCOLIQUE

C'est le miroir du temps qui passe
L'interminable mélodie
Des heures et des jours noués à l'espace
Des fines étoiles de la nuit.
p.82

" PORTRAIT
…Se pourrait-il que je ne sois qu'une ombre
Cette fumée qui s'échappe criblée de pluie
Et de lumière.
p.10

" LA MÈCHE
La mémoire est l'instrument initial
En proie à quelque inusable passion
Aux travaux des lieux pleins de fraîcheur
Habités par un rêve inabouti.

Brusquement   il arrive qu'on allume une lampe
On avait cru voir passer une ombre une ombre bleue
Et chère  et peut-être pourrait-on reconstruire
Un monde        avec la petite musique
D'une mèche de cheveux
p.69


" LES NUITS DE JUIN…
Mémoire : ici l'on marche au ralenti.
p.35

" LA MAISON DU TEMPS
Nuit en moi nuit sans visage et sans larmes
Je viens vers toi
Tu es mon regard tu es ma source

Il y a une nuit blanche et noire
En chaque parole dite
Il y a une nuit dans la cendre
La trace et l'écho
Aucune ombre un simple souffle

Elle est la maison du temps
Le visage pure de l'absence
Le silence de mémoire
Un livre de papier blanc

Ma vie est une île déserte
Chaque matin ce balbutiement
Cet effroi et ce commencement
p.15
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Lorsqu'on lit les vers de Lionel Ray, on entre dans un monde de dispersion. Ce qui intéresse le poète est le rôle que le souvenir humain – fondé sur les mots – peut jouer dans l'océan immense du temps en mouvement. L'île est d'ailleurs une image qui lui plaît. Elle se présente dans la première section du livre : « Sous l'orchestre des astres ». Dans un poème qui porte le titre du livre : « La maison du temps », « Ma vie, mon île déserte » (vers 13) et dans le poème suivant « Ce monde sans fin » : « J'ai toujours parlé la langue des îles ». S'il n'y a pas les îles dispersées dans l'immensité de l'océan, c'est le ciel ou la nuit qui recouvre tout. Mais ces vers viennent de la première section, qui, à quelques exceptions près, est plutôt pessimiste, voire noire : tout n'est qu'ombre, fumée et désordre :

« Se pourrait-il que ne je sois plus qu'une ombre
Cette fumée qui s'échappe criblée de pluie
Et de lumière.
Ce désordre qui cherche à me ressembler
De l'une à l'autre face ce tumulte des lignes et des mots
Cette grimace. » (Portrait, p. 10)

Même les mots sont sens dessus-dessous.

Les deux sections qui suivent évoquent les deux extrêmes de la vie, la vieillesse « Grand âge … » et la jeunesse à l'école, « La cour aux tilleuls ». Dans les deux, lorsqu'il y a un espoir ou un instant de souvenir, il vient grâce à la nature. Les abeilles (souvent dans les tilleuls) unissent les deux sections : dans la première « Vieil Homme » (p. 29) : « une abeille fleur vive » et dans la seconde, « Abeilles » (p. 53) et « Paroles » (p. 55). C'est comme si Ray, à l'instar d'autres observateurs, trouvait quelque ordre divin dans le vol, à première vue désordonné, des abeilles. Baudelaire et le temple vivant qu'est la nature nous viennent à l'esprit.

La section suivante, « le ciel bascule », nous présente le silence. Il y a le silence de l'oubli (« Un chant silencieux », p. 64), mais aussi un autre, cultivé par la « Mère mémoire » qui « cherche un autre silence// Interroge des ombres qui n'ont plus rien à dire// Elle cherche une langue d'appels et d'échos » (p. 65). Dans la dernière section, « La neige du temps », Ray s'ouvre aux mots (par exemple « Fantasmagories », p. 70-71 « milliers de mots enfouis »). On peut penser que les mots sont le salut, mais Ray n'ose pas être aussi optimiste ou naïf. Les mots sont souvent comme un vol d'oiseau, une force vivante naturelle, mais qu'on peut peiner à saisir :

« Avec les mots tu ouvres la voie aux migrations
Et c'est un surgissement d'hirondelles de sources
Vives de ronces de mousses de corolles. » (Avec les mots …, p. 90)

Est-ce un monde sans repère, qui est balloté au gré des forces de la nature, des vagues, des vents, ou peut-on y trouver quelque chose de fixe ? Un poème de la première section nous arrête, à cause des brumes habituellement présentes, qui s'effacent : « Visage pur » (extrait p.18) :

« Très proche quelqu'un vous aurait appelée ou de très loin
Dans les solitudes d'automne et les patrouilles du crépuscule
Depuis ce lieu où s'effacent les brumes et il n'y a
Plus rien que le visage pur de l'Amour. »

Ce « visage pur » semble chasser les brumes.

A la fin, à travers le mot « d'antan » (« Cantique », p. 89 et « Autrefois les étés », p. 93), le poète évoque Villon, qui a chanté d'autres personnes emportées par le temps. Si Lionel Ray (de son vrai nom Robert Lorho) a quelque espoir devant le temps qui écrase les souvenirs, ce doit être dans un lien entre le naturel et l'humain, deux éléments qui peuvent s'opposer. Son écriture est concrète ; elle tient compte des odeurs, des surfaces, des goûts. C'est l'oeuvre de quelqu'un qui avec musicalité, rythme et forme originale (une ponctuation augmentée par des espaces étirés, comme des pauses pour en faire une lecture posée), sonde la nature et engage le lecteur dans sa quête.

Nous étions curieuses en choisissant la poésie. Pour nous, la poésie, en exprimant en moins de mots un pan de jeunesse ou un autre d'âge mûr avec tout ce que cela comporte de souvenirs, de regrets et d'observations, nous fait entrer dans une atmosphère de rêve. Ray a créé cette atmosphère où nous pouvons nous rappeler notre propre jeunesse, et évoquer ce qui nous a entouré, « Cent mille étoiles nous font signe ».
Lien : https://mastereditionstrasbo..
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Écrire la critique d'un tel livre ne prend son sens que dans la mesure où on pratique un exercice d'admiration. Je suis conscient, cependant, qu'il s'agit d'une réponse bien mince à l'émerveillement devant la poésie de Ray.
A qui connaît Bonnefoy et Jaccottet, je dirais qu'on se situe à égale hauteur, dans une poésie qui marie simplicité des mots et images saisissantes, pourtant faites de riens. le recueil est tourné vers l'enfance lointaine, évoquée en vers d'une nostalgie poignante qui ont peut-être couleur de "saudade" — mais il faudrait être portugais pour en juger.
Je n'en dis pas davantage, mieux vaut lire Lionel Ray.
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
IMPALPABLE


Impalpable comme
Un vol de martinets entre les toits
Comme l'éclat des voix
Ou le miracle d'une source
Impalpable comme l'accent du secret.

Et la chronique des Heures disparues
La scintillation des chansons anciennes
Impalpable comme l'horizon du temps
Dans la brume d'une enfance
Au carrefour des échos.

Impalpable comme ce rideau de pluie
Et le balbutiement des agonies
Comme le ciel qui tombe en ruine
Et l'étonnement des blanchisseuses
Et la poussière du souvenir.

Toutes les musiques sont douloureuses
Même la quête éperdue du silence.
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"PORTRAIT D'UNE OMBRE"

Il pleut de l'ombre. Elle déborde.
C'est une vague, une épaisse bouffée

De noir une haute brassée de silence.
Elle ne pleure ni ne rit cette ombre

Penchée sur moi et qui plonge
Au profond de l'être Sa douceur m'étreint

M'envahit C'est un dire muet
Une présence impérieuse une phrase

Imprévisible et qui cherche une fin.
Aucun bruit aucun froissement.

C'est une écorce énigmatique une peau
Très douce un élan souverain, simple

Affirmation de présence. Mais soudain furtive
Elle s'abîme dans sa propre disparition.
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"BUCOLIQUE"

Flammes et cendres braises
Sous les pains qui croustillent
Une porte ouverte le volet qui bat :
Maison parmi glaïeuls et fougères.

Toit moussu nuage des lichens
Vieux murs brouillon de lianes
La lumière frappe à la volée
La fleur des vitres qui se fane.

Et l'on entend de très vieux airs
C'était hier ou autrefois
Résonances des ombres des antiennes
Rideau des glycines et des voix.

C'est le miroir du temps qui passe
L'interminable mélodie
Des heures et des jours noués à l'espace
Des fines étoiles de la nuit.

De tout cela qui n'est que songe
C'est la poussière qui perdure
L'ensorcellement du mensonge
Le grand orchestre des aventures.
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La neige du temps
RÉSURRECTION


extrait 2

Nous connaîtrons des ruissellements d’aristoloches
[…]

Des cristallisations de volubilis des lectures d’eau morte
Entre estampes et caprices désastres et triomphes
Et les oiseaux qui s’évaporent sous le soleil

Des effondrements de ciels profonds et soudain
Habitables En attendant le colloque des traces
Des coulures les semis des étincelles

Enfin les plus hautes tours Il y aura des matinées
Heureuses au fil des rivières nous saluerons
La patience des heures les dernières glaces

La musique sinueuse des labours et la germination
Enfin d’un éternel sommeil
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Poussières d’étoiles

Tout s’est passé là-bas à hauteur d’arbres
Les années fuyaient en tout sens
Le temps nous avait oubliés.

Il aurait suffi d’un seul regard
Et le mot à mot du crépuscule
Aurait tinté à nos oreilles.

Nous aurions eu l’âme pleine d’oiseaux sauvages
Et de falaises
De villages de sentiers.

Il y a tant de choses que nous ne savions pas
Il aurait suffi d’écouter en soi
Le dialogue de l’aube et des voix.

Et cette musique des appels nocturnes
Le parler des feuillages des cuivres et des automnes.

Nous n’étions rien que poussières d’étoiles
Rien de plus que cela
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Vidéo de Lionel Ray
Non à la guerre. Anthologie. Poésies du monde, photographie, histoire Un livre sous la direction de E. Turgut Poèmes choisis par Lionel Ray
150 ans de conflits illustrés par la photographie, de la guerre de Crimée jusqu'au conflit israélo-libanais de 2006.
Quatrième de couverture Savez-vous à quand remonte le premier mouvement pacifiste ? Connaissez-vous l'origine de la colombe comme symbole de paix ?
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