La troisième révolution industrielle

Dans l'hypothèse où notre espèce parviendrait d'une facon ou d'une autre à survivre, je me demande souvent comment les générations futures verront dans cinq mille ans ce moment particulier de la saga humaine. Il est probable qu'ils nous appelleront les hommes de l'énergie fossile et baptiseront cette période I'Age du carbone, comme nous parlons de l'Age du bronze et de l'Âge du fer.[p.27]

Au XXIème siècle, des centaines de millions d'êtres humains vont produire leur propre énergie verte dans leurs maisons, leurs bureaux et leurs usines et la partager entre eux sur des réseaux intelligents d'électricité distribuée - sur l'inter-réseau -, exactement comme ils créent aujourd'hui leur propre information et la partagent sur internet. (p.57)

Les 5 piliers de la 3ème révolution industrielle :

1) le passage aux énergies renouvelables

2) la transformation du parc immobilier de tous les continents en ensemble de microcentrales énergétiques qui collectent sur site des énergies renouvelables

3) le déploiement de la technologie de l'hydrogène et d'autres techniques de stockage dans chaque immeuble et dans l'ensemble de l'infrastructure, pour stocker les énergies intermittentes

4) l'utilisation de la technologie d'internet pour transformer le réseau électrique de tous les continents en inter-réseau de partage de l'énergie fonctionnant exactement comme internet (...)

5) le changement de moyens de transport par passage aux véhicules électriques branchables ou à pile à combustible, capables d'acheter et de vendre de l'électricité sur un réseau électrique interactif continental intelligent.
(pp58-59)

Une opinion publique stupéfaite a vu, semaine après semaine, le pétrole jaillir d'une profonde crevasse dans le plancher océanique : sa nappe noire se répandait dans toutes les directions, tuait les êtres vivants, détruisait des habitats délicats et menaçait de transformer le golfe du Mexique en mer morte. Ce désastre écologique soulignait une douloureuse réalité : par volonté désespérée de maintenir en marche le moteur de l'économie, nous sommes prêts à nous lancer dans des entreprises toujours plus risquées pour trouver une énergie fossile rare, même si cela implique la destruction de nos éco-systèmes

La troisième révolution industrielle n'est pas une panacée qui guérira instantanément la société de ses maux, ni une utopie qui nous conduira à la Terre promise. C'est un plan économique pragmatique, sans fioritures, pour tenter la traversée jusqu'à une ère postcarbone durable. S'il y a un plan B, je ne le connais pas.

Les militants du Tea Party et des millions d'autres Américains ont raison d'avoir peur ou d'être en colère devant ce qui se passe en Amérique. Ils ne sont pas les seuls. Dans le monde entier, d'innombrables familles sont aussi effrayées qu'eux. Mais forer pour trouver davantage de pétrole ne nous sortira pas de la crise, parce que la crise, c'est le pétrole.

L'Union européenne s'est rendue aux négociations sur le climat de Copenhague avec une proposition : que les pays du monde plafonnent les émissions mondiales de dioxyde de carbone à 450 parts par millions en 2050, dans l'espoir que, si cet objectif était atteint, on pourrait limiter la hausse des températures terrestres à 2°C . Une hausse de température de 2°C aurait un impact dévastateur sur les écosystème de la planète, mais nous pourrions y survivre. Malheureusement, les autres pays du monde ont refusé de prendre même cette décision minimale pour conjurer les ravages du réchauffement.

Nous subissons déjà l'impact hydrologique d'une hausse d'un demi-degré de la température terrestre sur l'intensité des ouragans. Une étude de 2005 publiée dans la revue Science conclut que le nombre de tempêtes des catégories 4 et 5 a doublé depuis les années 1970. Katrina, Rita, Gustav et Ike sont un sérieux rappel de ce qui attend l'espèce humaine quand le siècle actuel sera plus avancé.

Si j'avais depuis longtemps compris l'urgence du réchauffement, j'avais aussi, comme beaucoup de mes interlocuteurs, constamment sous-estimé la vitesse à laquelle montait la température de la Terre. Je n'avais pas correctement évalué les puissants effets de synergie qui pouvaient résulter de boucles de rétroactions positive imprévues. Par exemple, quand les glaces de l'Arctique fondent parce que l'augmentation de la concentration de CO2 dans l'atmosphère réchauffe la planète, leur fonte empêche la chaleur de quitter la Terre. La diminution du manteau neigeux est une perte de capacité réfléchissante - le blanc réfléchit la chaleur et le noir l'absorbe : il y en aura moins qui pourra s'évader dans l'espace. Ce phénomène réchauffe la Terre encore davantage et fait fondre la neige encore plus vite, dans un cycle de rétroaction positive qui s'accélère. On peut prendre cette seule boucle et la multiplier par un nombre de possibilités presque sans fin, puisque d'autres changements abrupts de la biosphère de la Terre déclenchent leurs propres boucles de rétroaction : l'immensité du phénomène auquel nous sommes confrontés est absolument terrifiante.

Un effondrement économique d'envergure comparable à la Grande Dépression se dessinait, et cette perspective a forcé l'Etat américain à intervenir, en renflouant les sociétés financières de Wall Street à hauteur de 700 milliards de dollars. Renflouement qu'il a justifié en affirmant qu'elles étaient "trop grandes pour faire faillite"