Eté
Les pas sont légers
L'herbe se relève vite
Il fait soleil dans la clairière
La forêt est encore fraîche
Entre les feuilles silencieuses
la clarté plante ses javelots
La boue sèche a conservé
la trace d'un chevreuil
deux ongles bien dessinés
L'été commence à peine.
Le Haut-Bout
Samedi 16 juillet 1988
Il suffit de se taire d'écouter de sentir d'attendre que surgisse
l'instant sans réponse parce qu'il est sans question
Quand viendra la fin des voyages
la fin des fins la fin de tout
qui pourra croire à mon passage ?
C'était un autre Voilà tout.
L'ombre de la forêt
Je voudrais que l'ombre de la forêt
m'accompagne au retour vers la maison reclose
entre avec moi sans avoir peur à peine intimidée
s'asseye avec nous devant le feu qui craque et flambe
Je voudrais que sur mes genoux de nuit noire
la chatte noire saute d'elle-même et se mette à
ronronner qu'une légère ombre amicale
partage avec nous la veillée dorme à notre côté
et s'en aille seulement sur la pointe des pieds
quand le jour inventera un autre matin clair
Le Haut-Bout
Jeudi 1er janvier 1987
Le vent la nuit
J’entends dans mon sommeil une porte qui bat
le vent chassant le vent qui court à perdre haleine
Il frappe à la fenêtre Il revient sur ses pas
Il claque les volets Il secoue les persiennes
Est-ce un vrai bruit vivant dans la nuit où je dors ?
Est-ce un volet des nuits d’une maison d’enfance
qui tape sans savoir contre un mur d’autrefois ?
Est-ce le vrai vent dans la vraie nuit dehors ?
Est-ce aujourd’hui ? Est-ce jadis ? Vent Nuit Silence
Je ne sais où je suis Je ne sais où je vais
Je m’éveille à demi sans trouver la réponse
Dans le sommeil sans rêve lentement je m’enfonce
A la tombée du jour on ne sait pas non plus
si on a le cœur triste d'un jour déjà passé d'une journée de moins
ou bien le cœur calme parce qu'on a vécu près de ceux qu'on aime
ou simplement des sentiments brouillés vaguement métaphysiques
Les lumières de la nuit tremblent dans la brume
(...) et soudain ton rire éclaboussant d'eau fraîche
une idée qui nous est venue en parlant
(...)
Un peu d'eau fraîche ta voix ton silence
Fermer les yeux Te savoir là
A métaphysiquer ici je dois être le seul
Les arbres les oiseaux la biche et l'écureuil
distinguant assez mal l'existence et l'essence
se demandent rarement si le monde a un sens
(...)
Il suffit de se taire d'écouter de sentir d'attendre que surgisse
l'instant sans réponse parce qu'il est sans question
Au creux de la nuit
Au creux de la nuit quand le vent rôde et vague
à l'heure où le feu sourd parle encore à voix basse
où la braise et les cendres rêvent confusément
en caressant dans l'ombre les corps enfin dénoués
n'ouvre qu'au chat si très léger il le demande
parce qu'il est calme et lent et noir dans la nuit noire
Le Haut-Bout
Dimanche 31 mai 1987