1936, à Monza, gros bourg de la plaine du Pô, dans le nord de l'Italie.
La très sage Francesca, 12 ans, s'ennuie ferme entre les murs bourgeois d'une famille «bien comme il faut », coincée entre un père distant et une mère obnubilée par le paraître et les bonnes manières.
En chemin pour la messe, elle espionne en secret le groupe de copains, sales et aux genoux écorchés, qui plongent dans le Lambro en contrebas de la rue. Menés par «
la Malnata », la mal-née, cette gamine des bas quartiers que tout le monde montre du doigt en chuchotant. Car la môme porte malheur, autour d'elle les gens succombent de maux mystérieux, comme envoûtés par la voix du diable… Une réputation de sorcière et des origines pauvres qui n'effraient pourtant pas Francesca, tant le pouvoir d'attraction qu'exerce
la Malnata sur elle est forte. Et entre les deux jeunes filles va naître une indéfectible amitié.
Un premier roman assez immersif, à l'ambiance lombarde joliment rendue, et aux personnages attachants.
Avec en toile de fond cette Italie du Dulce, fervente et patriote, où il ne fait pas bon critiquer ouvertement les chemises noires, au risque de «disparaître » socialement (ou pire).
Les détails d'un quotidien rendu difficile par l'entrée en guerre, les cancans ordinaires d'une bourgade où les différents milieux sociaux ne se côtoient pas, le poids des traditions et la politique oppressante d'un Mussolini tout puissant , tout cela est vu à hauteur d'ado, avec candeur pour l'une, insolence pour l'autre, rendant le récit d'autant plus dramatique.
Je me suis volontiers laissé embarquer dans les aventures caillouteuses de ces jeune filles pas tout à fait sorties de l'enfance, plus tout à fait naïves non plus sur le monde des adultes et notamment sur la place des femmes dans l'Italie fasciste très patriarcal, le regards des hommes sur leurs corps, le carcan marital qui les attend, elles qui ne rêvent que de liberté.
Une amitié féminine lumineuse qui contraste avec le contexte historique tragique, dans ce premier roman assez réussi, malgré quelques maladresses notamment dans les portraits parfois un peu caricaturaux.
Peu importe, j'aime les histoires de sororité, d'amitié «à la vie, à la mort » et les héroïnes fortes, rebelles et résiliantes.
Francesca et surtout la fascinante Maddalena sont parfaites dans le genre.