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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Entre la fin du XVIème siècle et le début du XVIIème, la bourgade bavaroise de Würzburg est le théâtre d'un des épisodes d'une chasse aux sorcières qui est alors à son apogée. le Prince évêque de la ville entend ainsi lutter contre la menace luthérienne. C'est un temps d'exécutions publiques dont les spectateurs se repaissent et de dénonciations opportunes, de tortures et de bûchers. Instaurer le règne de la douleur et de sa peur permet aux puissants d'asseoir leur emprise, en dissuadant les paysans de se rebeller et en nettoyant la région de tous ses indésirables : vagabonds, mendiants, et surtout les femmes, objets de tentation.
Anna, taxée de commerce avec le Démon, devient une des victimes de cette folie purificatrice. Elle est en réalité dénoncée sur la base d'un ressentiment bien plus prosaïque : jeune, belle -et rousse-, elle est l'étrangère qui, ramenée de Walldürn par son époux Klaus, a allumé une flamme lubrique dans les yeux des maris, initiant la haine des épouses. Pour se débarrasser de cette encombrante voisine, Gerda lui impute, auprès des autorités idoines, le lait qui tourne après la traite, les vers dans les fruits, la sécheresse qui depuis deux ans sévit dans leur village. Les fausses couches qu'a subies la jeune femme et ses promenades en solitaire dans la forêt sont d'ailleurs des preuves évidentes de sa possession.

L'accusatrice trouve en la personne de l'inquisiteur Vogel, homme aussi pervers que fanatique, une oreille plus qu'attentive.

Anna est brutalement enlevée de son foyer, et emmenée à la prison de Wurtzbourg, où elle sera torturée de longues semaines, car elle tient bon, clamant son innocence malgré son dos et ses doigts brisés, ses membres luxés... Pourtant, on le sait d'emblée : malgré ses dénégations, et les témoignages de son époux et du père Friedrich, le curé de son village, qui se démène pour démontrer que la jeune femme est victime d'une injustice, Anna finira sur le bûcher. Une accusée est forcément coupable, et toute parole en faveur de sa défense est transformée, par le crible d'une rhétorique dogmatique et obscurantiste, en argument pour une vérité d'emblée établie et par ailleurs nourrie des fantasmes pervers qui hantent ceux qui jugent, celle que cette femme est une sorcière.

Quel texte ! Avec de seules virgules pour ponctuation, porté par un flux où lyrisme et tension se bousculent, il parvient par un mystérieux paradoxe à allier modernité et ancestralité. Empreint d'une violence d'autant plus insoutenable qu'elle est profondément inique, on serait tenté de qualifier "Anna Thalberg" de conte macabre et cruel, avant d'en être retenu par la conscience de sa véracité.

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XVIème siècle, Anna Thalberg, jeune femme vivant chichement avec son mari dans un petit village fut dénoncée par une voisine et conduite à Wurtzbourg, ville de Bavière où elle subira la question avant d 'être brûlée vive sous couvert d'accusation de sorcellerie.
Son cas se démarque par sa résistance face au bourreau mais surtout face à l'examinateur qui par idéologie sait qu'il sacrifie une innocente.
De nombreuses autres personnes accusées des mêmes faits endureront le même destin.
À noter, la pauvreté er l'aberration des motifs retenus pour condamner des Hommes de sorcellerie et la perversité des tortures physiques et psychiques employés.

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Nous sommes en Allemagne entre les XVIe et XVIIe siècles. Nous faisons la connaissance d'Anna Thalberg, une jeune femme accusée de sorcellerie. Anna est innocente mais à l'époque des procès pour sorcellerie, il était quasiment impossible d'arrêter la machine judico-religieuse, une fois lancée.

La jeune Anna est si attachante, si digne, qu'elle nous insuffle le courage de l'accompagner dans son cachot. Nous la découvrons aux mains de fanatiques cruels et sadiques et suivons son "procès". Une mise en page originale vient en appui au texte. On y trouve, par exemple, des dialogues présentés "face à face".

Ce n'est pas une lecture de tout repos comme vous l'imaginez. Si ce livre ne m'avait pas été conseillé, je n'aurais sans doute pas osé m'y plonger, le thème m'aurait fait trop peur. Je serais passée à côté d'un très beau premier roman qui a obtenu le prestigieux prix Mauricio-Achar.
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J'arrête la lecture de ce court roman de 160 pages d'Eduardo Sangarcia, "Anna Thalberg" à la moitié car le sort de cette jeune femme semble jeté à la prison de Würtzburg en pleine époque de chasse aux sorcières et je n'ai pas le coeur à lire toutes les abominations qui vont suivre. La qualité de ce roman tient à son style, particulièrement puissant.
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Roman violent qui donne envie de hurler à l'injustice et à la vilenie de certains hommes et femmes. Ce livre m'a beaucoup touchée, la force mentale et physique de Anna, l'impuissance de son mari et du curé du village, l'innocence et l'inconscience du confesseur, la méchanceté des gens du village et la violence extrême et froide DES bourreaux.

Quand on pense à tous ceux qui ont été punis pour sorcellerie, mon coeur saigne. Insoutenable, l'horreur.

Écriture particulière, pas toujours facile à ingérer mais différente et bien adaptée à cette histoire.
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Alors qu'elle attend Klaus dans leur modeste chaumière, que le repas cuit dans l'âtre, Anna est enlevée de force par des brutes. Ils l'emmènent et l'enferment dans la tour des sorcières, à Wurtzbourg. Gerda, une voisine jalouse, éprise de vengeance, l'accuse de vénérer Satan. Elle l'aurait même vu volant sur une chèvre au-dessus des toits. Anna crie son innocence, fait face aux tortures, soutient le regard de l'examinateur Vogel… Mais les croyances sont tenaces, et les femmes bien peu de choses au coeur de ce 16eme siècle tourmenté…

Anna Thalberg est un roman aussi poignant que révoltant. C'est avec un style très particulier, totalement envoûtant, que l'auteur nous précipite dans une petite ville allemande, aux côtés de villageois simplement monstrueux.

Eisingen aurait pu être une bourgade apaisée, au quotidien certes difficile mais sans coups d'éclat. Anna n'en est pas originaire, elle a épousé Klaus et l'a suivi. Elle a toujours senti des réticences à son égard mais elle n'y a jamais prêté attention. Peut-être aurait-elle dû se méfier…

L'écriture d'Eduardo Sangarcia est sublime. Elle alterne les personnages, leurs pensées les plus vils et leurs grandeurs d'âmes. Elle nous plonge dans l'humidité d'une cellule et dans l'intolérable d'une salle de tortures. Elle n'épargne pas le sourire mauvais et la joie de la vengeance.

Anna Thalberg est une femme qu'on a cloué au piloris, qu'on a brûlé sur un bûcher, dont on a étouffé les cris. Parce qu'elle était différente, une rousse aux yeux de miel, on a cherché à l'effacer pour ne plus la craindre… Là, un vertige nous prend… La peur de l'autre, de l'inconnu, ça nous parle, malheureusement… Et si les tortures et autres accusations ont changé, l'anéantissement, la disparition, l'élimination semblent toujours être la triste solution…
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En ce tournant du XVIIe siècle, Anna Thalberg, une étrangère rousse de vingt-deux ans dont l'éclat attire un peu trop le regard des hommes pour ne pas contrarier leurs épouses, mène avec son mari Klaus l'existence paisible des paysans de Bavière, lorsque, fort opportunément dénoncée pour diverses diableries par sa voisine – depuis son arrivée au village, des nourrissons sont morts, la sécheresse sévit, on l'a même vue chevaucher une chèvre dans les airs –, elle est arrêtée et transférée dans les geôles de Wurtzbourg en attendant son procès pour sorcellerie.


Malheureusement pour elle, son sort dépend du prince-évêque catholique de Mespelbrunn, contre-réformateur bien décidé à débarrasser la région des hérétiques idées luthériennes, fût-ce par le biais de la persécution et au moyen d'une chasse aux sorcières qui, dans tout l'évêché de Wurtzbourg, va causer la mort de neuf cents personnes. Désormais entre les mains d'un examinateur déterminé à la voir finir sur le bûcher pour le bien-être de la ville et du diocèse, Anna ne comprend pas encore qu'elle a beau être innocente et ne pas cesser de le clamer malgré l'atrocité des tortures qu'on lui inflige, il n'existe plus pour elle que deux alternatives : être brûlée vive ou déjà morte, selon qu'elle persiste à nier ou qu'elle se résolve à des aveux.


Relaté avec force détails éprouvants, le supplice d'Anna, en l'occurrence fille de charpentier, n'est pas sans évoquer la passion du Christ : lui, convaincu jusqu'au bout que Dieu ne l'abandonnera pas ; elle, longtemps confiante en la force de son innocence et de la vérité. Si la jalousie et la peur ont motivé la calomnie et la délation à l'encontre de la jeune femme, sa condamnation est le fruit de convictions fanatiques, qui, au nom de la religion et du Bien, mènent au pire des hommes follement persuadés de détenir la vérité. A ce radicalisme aveugle répond l'inflexible résistance d'Anna, qui ne sauvera certes pas sa vie, mais saura, en un très ironique dénouement, prendre le Mal à son propre piège. A user de la violence et de l'arbitraire, ne s'expose-t-on pas toujours à un retour de feu ?


Animé par le ressac de longues phrases sans fin, où les paragraphes s'enchaînent comme autant de vagues signalées chacune par un retrait, le texte s'épand comme un irrépressible raz-de-marée, emportant personnages et lecteur au bout d'une folie absurde et destructrice touchant à l'insupportable. Cette cohérence parfaitement étudiée entre la forme et le fond parachève la puissance de cette dénonciation des fanatismes, extrémismes et radicalismes de tout poil, en particulier religieux et politiques, pour en faire simultanément une oeuvre littéraire dont il n'est pas étonnant qu'elle ait valu à son auteur le prestigieux prix Mauricio Achar.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Voilà un roman pas comme les autres, déstabilisant, notamment dû au fait de l'absence de majuscules en début de phrase, de points finaux, de l'avarice de virgules et de tirets cadratins ou de guillemets pour signaler les dialogues.

Un alinéa pour signaler le début d'un nouveau paragraphe et un double alinéa pour les dialogues, c'est tout. Perturbant pour moi, mais je m'y suis vite habituée.

Comme je l'ai souvent dit, la taille d'un livre n'est pas importante (pour le reste, je vous laisse seul.e juge).

La preuve une fois de plus : 159 pages d'une noirceur absolue, faite de fausses accusations de sorcellerie et de tortures, de fausse justice, de médisance, de peurs, de superstitions, de pouvoir et de religion toute-puissante.

Dans l'Allemagne du XVIe siècle, une personne comme Anna Thalberg dérangeait : elle était jolie, avait les cheveux roux, les yeux couleur de miel et pire encore, elle venait d'ailleurs ! Oh, pas du bout du monde, même pas d'un autre pays, juste d'un village plus loin… Mais je n'ai pas besoin de vous faire de dessin sur la noirceur humaine et ce que certains sont prêts à faire pour se débarrasser d'une personne qui les dérange.

L'accusation de sorcellerie est LE truc génial que l'on a inventé pour éliminer celles ou ceux qui gênent. Impossible de prouver que vous n'en êtes pas une et sous la torture, tout le monde avouerait n'importe quoi.

Kafkaïen sera son procès : elle est coupable, point à la ligne. Si elle avoue, elle renforce l'accusation et si elle n'avoue pas sous la torture, alors c'est qu'elle est aidée par le Malin, le Diable, l'antéchrist… Bref, entre la peste et le choléra, le choix est maigre.

Et puis, il ne pleut plus depuis longtemps, c'est la faute d'Anna et sa mort servira de sacrifice et il pleuvra, sans aucun doute… Son avenir est déjà tout tracé. La justice ? "Mes couilles, ti", comme le dirait si bien Fabrizio le carolo (les Belges comprendront).

La force de ce roman, c'est la confrontation entre Anna et Melchior Vogel, le grand inquisiteur, le salopard qui l'a condamnée à la torture. Jamais elle ne baissera les yeux. L'autre point fort, ce seront les longs entretiens entre Anna et Hahn, le confesseur inquisiteur. Anna est une femme forte, droite dans ses bottes et elle ne lâchera rien.

Tous les genres se mélangent, dans ce court roman, intense : la politique, la religion, l'histoire et la philosophie. Il est difficile de ne prendre ce roman qu'au sens littéral, tant il a des niveaux de lecture qui s'entremêlent, harmonieusement, puisque tout est lié.

Le côté historique est bien rendu, sans devenir indigeste, et le côté politique entre en ligne de compte parce qu'avec ces procès en sorcellerie, les puissants gardent le pouvoir et tiennent tout le monde sous leur coupe. Idem pour le côté religieux, avec l'opium du peuple, on les fait marcher droit, on leur fait peur.

La philosophie intervient dans les questionnements : qu'est-ce qu'il y a après la mort ? Ainsi que dans le fait que certains croient mordicus être les détenteurs de la vérité sur Dieu, qu'il leur parle à eux, qu'ils sont élus et que c'est à eux que revient l'indicible honneur de faire marcher tout le monde droit.

Le final est superbe, prouvant que la vie ne manque jamais d'ironie, ni d'humour noir et que la roue tourne…

Un roman étrange, dérangeant, court, qui m'a sorti de ma zone de confort.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Avec ce roman court mais particulièrement dense, Eduardo Sangarcia s'empare d'un sujet historique qui secoua l'Allemagne du XVIe siècle : le procès des sorcières de Wurtzbourg. Anna Thalberg se révèle être un roman ne ressemblant à aucun autre, de par sa forme, tout d'abord. En effet, par une prouesse stylistique ne répondant à aucune norme connue , l'auteur parvient à rendre compte des points de vue et pensées de chacun des différents protagonistes, de ce récit dramatique, allant même jusqu'à réussir à faire se superposer les dialogues entre deux personnages et leurs propres monologues intérieurs. En s' intéressant au cas particulier de la jeune Anna, c'est à toutes les prétendues sorcières que l'auteur rend un vibrant hommage, rappelant qu'elles furent avant tout des héroïnes de la résistance à l'ignominie.
Un récit dur, poignant, mais ô combien édifiant et nécessaire.
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Anna, 23 ans, est rousse aux yeux de miel. Une étrangère qui attire les regards des hommes et hante les rêves des maris. Il n'en faut pas plus pour que ses voisins, et particulièrement Gerda, l'accusent de sorcellerie, et la rendent responsable de tous les maux qui touchent le petit village d'Eisingen. le grand examinateur Vogel est aux anges, les nombreux témoignages le prouvent. La mort des nourrissons, c'est elle ! La sécheresse ? Encore elle. Les maris corrompus par ses attraits? L'oeuvre de Satan à n'en pas douter.

Alors qu'elle est seule dans sa chaumière, les soldats de l'Inquisition viennent l'arrêter. Mains attachées, tête recouverte d'une veille capuche. Direction la prison de Wurtzbourg pour y être jugée et exécutée. Car, Vogel n'est pas le garant de la vérité et de la justice. Non loin de là. Lui il est là pour exécuter, brûler. Alors, jour après jour, Anna est torturée. Elle finira bien par avouer. La violence s'accroît, mais elle ne flanche pas. Ne préfère-t-elle pas pourtant être pendue plutôt que brulée vive ?
Pendant ces interminables journées, au dehors, son mari Klaus et le curé Friedrich, tentent le tout pour le tout pour la sortir de la Tour…

Encore une fois, les éditions La Peuplade frappent fort avec ce court roman! Inspiré de faits réels, l'exécution de 900 personnes entre 1573 et 1617 au cours du Procès des sorcières de Wurtzbourg, l'auteur Eduardo Sangarcía nous livre un texte puissant, sombre et violent, mettant en scène l'hypocrisie de la religion et toute la cruauté humaine. Un roman que j'ai aimé aussi bien sur le fond que sur sa forme singuliere. En effet, la mise est page est faite de paragraphes décalés( plus ou moins intensément) ou côte à côte lorsqu'ils retranscrivent les confessions d'Anna. Je me suis même parfois amusée à lire que ceux décalés à gauche ou à droite pour voir si nous gardions une cohérence 😆.
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