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Critique de Dandine


Relecture (pour m'aerer d'un pave en cours).

Une courte nouvelle toute en monologue interieur. J'ai aime la coherence de ce monologue qui nous fait traverser efficacement le temps (une longue nuit) et l'espace (une longue promenade dans Vienne). Sans digressions (car sans vraiment utiliser le flux de conscience), Schnitzler ecrit un magnifique drame psychologique: Un officier de l'armee imperiale est offense par un boulanger, un homme de basse extraction qu'il ne peut donc provoquer en duel. Il ne voit plus qu'une issue (ou il pense que selon les codes d'honneur de l'armee il n'a qu'une solution pour laver son honneur): se suicider. Il passe donc toute une nuit a errer, cherchant la meilleure maniere de se donner la mort, et en fait triture par la peur de celle-ci.

Schnitzler, medecin de formation sinon de carriere, a ete toujours interesse dans ses ecrits par l'erotisme et la mort (en temoignent aussi "Nouvelle revee", "La ronde" ou "Mademoiselle Else", dont j'avais fait des billets que je devrais peut-etre refaire). Il a une profondeur psychologique admiree par Sigmund Freud, qui voyait en lui un "double" litteraire.

Mais il y a plus. Ecrite en 1900, cette nouvelle attaque de front le code de l'honneur qui orientait encore l'armee, et que Schnitzler trouve desuet pour ne pas dire caduc, pernicieux pour ne pas dire immoral. Et ce n'est pas un hasard si un tribunal militaire a immediatement juge l'auteur et l'a dechu de son titre de medecin militaire de reserve.

J'aime bien Schnitzler. Dans ses photos il a l'air d'un bon bourgeois viennois, bien ne dans une riche famille juive assimilee. En fait c'est un revolutionnaire. Dans les lettres allemandes il est le premier a utiliser le monologue interieur et le flux de conscience. Et ses ecrits sont un requisitoire contre les moeurs de la societe dans laquelle il vit. Ses heros sont tous (ou presque) choisis au sein de la bourgeoisie, mais ils denoncent tous les artifices, les trompe-l'oeil, les mensonges, les faiblesses, les abjections de leur classe. Ils traduisent tous la decadence de cet empire pompeux du centre de l'Europe. Il ne s'en laisse pas conter, le Schnitzler. Et en plus il sait ecrire. Il merite sa place au parnasse du "demi-siecle d'or des lettres autrichiennes".

Cette petite nouvelle est une perfection. Centenaire, elle pete encore la jeunesse et la santé. A lire.
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