Un livre complexe, touffu, très émouvant. le narrateur est un de ces enfants de rapatriés d'Algérie, de ceux qui ont reçu «
L'Algérie en héritage », selon le beau titre du recueil de témoignages de
Martine Mathieu-Job.
Né en 1969, il s'interroge, comme tous ces autres jeunes adultes de ce collectif, sur ce que représente cette « algérianité » ou même cette « pied-noiritude » que le narrateur ressent en lui, lui qui ne s'intéresse pourtant « ni aux morts, ni à la guerre », ni d'ailleurs, me semble-t-il, au gaspacho ou à la tchoutchouca ! C'est une quête sans espoir des origines, à travers les rencontres, les associations de rapatriés souvent décevantes, l'histoire familiale. Toute une reconstitution kaléidoscopique de cet Oran d'autrefois, avec ses mélanges de cultures et de destins, de cet Oran du souvenir « où il ne pleuvait jamais ». La perte d'une enfant, à peine adolescente qui semble référer à la perte d'un pays, de l'image d'un pays. Et des signes, des signes, comme par exemple cette mi-février, récurrente, date de la mort de cette jeune fille comme de celle de sa grand'mère, en relation avec le mois de l'arrivée des Français à Tlemcen. Des signes, des signes mais… « de quoi, je n'en ai aucune idée, et c'est un peu le problème des signes. On ne sait jamais de quoi ils sont, les signes ».
Ne cherchez aucune certitude dans ce livre foisonnant, désinvolte, douloureux et digne, remarquablement écrit. Perdue dans ce labyrinthe d'incertitudes, jalonné de souffrances et de preuves d'amour, écoutant comme la voix familière d'un ami, je l'ai lu d'une traite.