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Critique de colimasson


Après l'évocation de la vie des juifs dans les ghettos, le tome 2 de la série Maus s'attarde sur les camps de concentration – Auschwitz pour Vladeck, le père d'Art, et Birkenau pour Anja, sa mère-, passant de la mort, de la maladie et de la souffrance à l'espoir, qui culmine lors de la libération des juifs à la fin de la guerre.

Le récit se fait plus haletant que dans le premier tome. La mort rôde partout. Pour survivre dans les camps, il faut être rusé, comme Vladeck n'hésite pas à le répéter. Il faut savoir user de ses talents, de la moindre de ses connaissances, que ce soit en tant que zingueur, que cordonnier, ou qu'il s'agisse de la maîtrise de l'anglais, pour trouver de l'intérêt aux yeux de ceux qui ont du pouvoir et pour trouver à manger. Il faut détenir les informations qui sont utiles : savoir se placer à l'extrême gauche d'un bataillon de juifs lorsque les allemands arrivent pour remplir leurs fourgons, car ils auront probablement déjà assez de monde lorsqu'ils arriveront à la moitié du bataillon ; se placer au bon endroit de la file lors de la distribution de la soupe au navet, de façon à ne pas avoir le bouillon inconsistant du début, sans risquer de trouver la casserole vide lorsque vient son tour de se faire servir. Mais le hasard joue également un rôle non négligeable dans la survie des déportés, et la terreur que ceux-ci ont supportée, Art Spiegelman arrive à nous la faire ressentir sous la forme d'une tension qui ne faiblit pas à un instant, même si on la sait ridiculeusement moindre à celle ressentie en réalité.


Parallèlement à ce récit d'un rescapé des camps de concentration, Art Spiegelman inclut de nombreuses pages de réflexion sur son travail d'écriture. Il commence à rédiger le tome 2 de la série en 1986, quatre ans après la mort de Vladeck. Entre-temps, son fils est né, et le premier tome de la série a été publié et a rencontré un grand succès. Art Spiegelman subit de nombreuses pressions de la part des journalistes et des hommes d'affaires qui le harcèlent pour adapter son ouvrage sous forme cinématographique. Cette cupidité le dépossède et renforce encore son sentiment de culpabilité vis-à-vis de ce qu'a subi son père. Comment arriver à devenir quelqu'un lorsque l'on a été élevé par un rescapé de la seconde guerre mondiale ? Et comment ne pas se sentir coupable lorsqu'on arrive à devenir quelqu'un malgré ce qui est arrivé à son père ? Ce sont les questions que se pose Art Spiegelman dans cet ouvrage, et auxquelles il essaie de répondre avec toute la sincérité dont il peut faire preuve.


Avec un recul d'un demi-siècle, Art Spiegelman livre un point de vue neuf sur la Shoah et sur ses implications sur les générations suivantes. Son talent est si grand qu'il parvient même à transférer à son lecteur sa culpabilité. A-t-on le droit d'éprouver tant de plaisir à lire le récit de ce qui fut la tragédie d'un jeune homme ? Sans doute pas, mais il est impossible de faire autrement…

Lien : http://colimasson.over-blog...
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