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Citations sur Ces rêves qu'on piétine (142)

Je n’ai même pas eu le temps de l’embrasser, dit-il.
— Qui ça ? demande-t-elle.
— Ma mère. Je n’ai pas pu l’embrasser! Les soldats nous ont tassés dans des trains pour la Pologne. Mon cousin est mort de froid, à côté de moi. C’était la première fois que je voyais un mort. Et il avait mon âge ! Sur le quai de l’arrivée, on a reçu d’autres coups. Olejak nous a sélectionnés, mon père et moi, pour son camp. Je suis devenu un homme au fond d’une mine.
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Ils sont impatients. Que leur maître se rende ou se tue, peu leur chaut ! Les soldats meurent au combat. C'est dans l'ordre des choses. Et quand l'ordre s'inverse, quand l'encre de l'armistice est sèche, ce sont les chefs qui meurent. Les soldats, eux, rentrent chez eux. Pourvu que l'encre sèche vite.

p.269
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Au fond de ce couloir parcouru par les rats, les spasmes des bombes d'en haut, l'humidité, l'odeur des chiens qui défèquent partout, Adolf a le charisme d'un grabataire sénile. Il ne fait même plus danser Eva pour lui.
Ce diable boiteux de Joseph, son âme damnée, sec et cerné, se traîne dans son sillage. Même enfoui dans ce réduit, il demeure tout à son maître, servile dépendant, obséquieux. Un vrai laquais. Il repart sans un regard pour sa femme. Ils font bunker à part. Sans Adolf, il serait sans pitié. Pour elle. Pour leurs enfants. Leur couple est un échiquier en fin de partie. La reine est nue et ne fait plus envie. Il a bien tué son aide de camp. Un mort de plus pour rien. Il ne savait rien d'elle, pourtant.
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Il s'approcha du micro et se mit à parler plus distinctement. Il évoqua le destin de ces ouvriers allemands ruinés par la dette et le Diktat. Il parlait de ces hommes comme s'il avait partagé leur quotidien. Son visage se rembrunit. Il s'approcha du micro et lança des questions sur l'origine de tous ces maux.
« Qui ? Qui a le droit ? Qui a imposé cela ? »
Il désignait les coupables de la crise par leur nom : le banquier Schultz, le ministre Weiss et laissait à la foule le soin de les réduire :
« Juifs !
−Le patron Köhn et le général Kinzbergersten.
−Juifs ! Juifs ! » râlaient quinze mille personnes à chaque nom en pâture.
C'était un roulement de locomotive qui crachait « Juif », comme « suif » à chaque tour de bielle, comme l'hélice d'un paquebot propulsant des milliers d'âmes à coup de pales fendant les flots : « Juifs ! Juifs ! »
Un grondement irrésistible qui grandissait le gauleiter. Il incarnait sa haine, se gonflait de cette rage bien branlée.
« Juifs ! Juifs ! »
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La beauté à sa propre poésie. Elle fait du bien à ceux qui savent la voir.
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Apprendre à étouffer ses doutes, les jeter, s'en débarrasser. Le poids des morts est un fardeau. Les doutes détruisent. Les certitudes élèvent. Les ambitions, la volonté, la force et le courage font la grandeur. Le doute est une mort lente, un épuisement de la race. Il y aura une victoire ou une chute.
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Réduit dans son dernier bunker, ce pantin de foire allait chuter, bientôt. Magda l’imagine en dessous. Un mètre de béton et de terre les sépare. Sa chambre est sous la sienne. Magda tape du pied, fait claquer le faux plancher. Le gauleiter est sûrement auprès de lui. Toujours ensemble. Le nabot et l’hystérique, le tremblant et le boiteux. Pour ce qui est de sa danseuse, Eva Braun, c’est de la pacotille, une mauvaise poudre aux yeux qui s’éparpille à la moindre brise. Magda prime. Elle le sait. Elle a quelques années d’avance sur Eva, et de longues nuits d’insomnie à le cajoler comme un gosse. Son mari, lui, aime davantage son Maître que celle qui a porté ses six enfants.
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Elle est curieuse, Lee, déformation professionnelle. Nature profonde. Quand on lui dit de ne pas aller, elle va, de ne pas dire, elle dit, de ne pas faire, elle fait, de ne pas chercher, elle cherche, ment, charme, triche, prêche, presse sans relâche... jusqu'à ce qu'elle trouve. Elle veut la une. Sa une. Elle veut qu'on parle d'elle, qu'on la lise pour comprendre, qu'on publie ses photos pour sentir, parce qu'elle, au moins, elle y est allée, elle est allée chercher l'information, la réalité sans boniment, sans bouche-trou ni rustine. Elle la mérite, cette une, parce qu'elle ira toujours aux limites, aux confins du possible pour rapporter des réponses.
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Le gauleiter espérait une famille nombreuse.

Magda voulait des égards.

Il voulait le triomphe.

Elle voulait qu’on la regarde.

Il avait le pouvoir.

Elle gomma son passé.

Il découvrit l’existence de Viktor.

Elle le laissa faire.

Il découvrit l’identité de son père.

Elle nia. Fit nier sa mère.

Il devint taciturne.

Elle sombra dans une profonde atonie.

Leur pacte était fragile.

Il reposait sur un jeu de dupes. Le poison du mensonge s’en était mêlé. Magda vivait ses derniers jours avec le souffle court de ceux qui sont hantés, effarés de l’intérieur, paniqués de partout.
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Un pas.Une pierre.Un chemin de poussière. Un printemps qui bourgeonne .Au fond bruit un torrent.
Des bruits .Mille pas.Tous aussi mal cadencés.
《 Il y aura bien une halte, plus tard ,pense t-il.Cette longue marche forcée s'arrêtera un jour.》
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