Un homme âgé de soixante-quinze ans, Daniele, qui se remet à peine d'une intervention chirurgicale qui l'a beaucoup affaibli, quitte son domicile de Milan pour aller garder son petit-fils Mario, âgé de quatre ans.
C'est sa fille, Betta, qui le lui demande, en fait qui le somme de venir, car elle se rend avec son époux à un colloque scientifique, pendant plusieurs jours. Elle ne s'est pratiquement pas occupée de lui pendant son hospitalisation à peine quelques coups de fils, et il doit tout quitter, et aller à Naples par le train !
Si encore, ils se voyaient souvent… Mais non, il n'a pas vu son petit-fils depuis très longtemps et se souvient à peine de son âge. le deal est simple, la femme de ménage doit venir et préparer les repas, Betta lui a laissé une liste de recommandations, et tout est sous contrôle. Mario jouera pendant que Daniele fera ses dessins pour l'illustration d'une oeuvre de James qu'on lui a commandée.
Sa fille a repris l'appartement familial, c'est à dire celui où Daniele a habité lorsqu'il était enfant, où il a subi la violence d'un père joueur compulsif, dans une ville qu'il déteste. Malgré les modifications apportées pas sa fille, cet appartement ne lui plaît pas et surtout fait remonter des souvenirs…
Comment occuper un gamin de quatre ans qui sait tout, parle comme un livre, dans un appartement qui a des pièges, telle une porte fenêtre qui ne s'ouvre que de l'intérieur avec un système compliqué…
Domenico Starnone nous livre, à travers ce récit, le drame de la vieillesse, du corps auquel on peut moins se fier, alors que le cerveau fonctionne encore bien, et le constat qu'un vieil homme peut faire au fil du temps : qu'a-t-il fait de sa vie, sa peinture, ses dessins qui ont fait de lui un artiste connu, autrefois, et sont méprisés par la jeune génération (son jeune blanc-bec d'éditeur lui parle sur un ton odieux !) mais aussi par sa propre famille.
Il nous propose aussi une réflexion sur la famille, l'évolution des relations parents enfant depuis sa jeunesse puis sa propre situation de parent de Betta. Comment supporter de se faire maltraiter par un bambin, car à sa place je crois que Mario se serait pris une baffe pour ne pas dire plusieurs, et ce n'est pas l'envie qui manque à Daniele mais « je le dirai à Maman » est une phrase magique….
Ce roman désarçonne, bouleverse. J'ai éprouvé beaucoup d'empathie pour ce grand-père, à peine plus âgé que moi et qui se retrouve seul alors que le monde change, et que ses certitudes s'écroulent de même que son estime de lui-même : il doute même de son talent. Il brosse un tableau de la tendance de plus en plus grande à l'égocentrisme, et en parallèle la solitude, la cohabitation entre les générations, où on prend mais on ne donne pas forcément…
Domenico Starnone a une très belle écriture, sans fioriture, mais un sens du détail et du terme adapté, un ton sans concession qui m'ont beaucoup plu. Il nous propose aussi des dessins attribués à Daniele qui sont beaux mais sombres.
Je n'ai pas lu « le coin plaisant » la nouvelle d'
Henry James qui sert de prétexte au récit, au départ, mais qui prend une place de plus en plus importante, un peu comme « La peau de chagrin » ou « le portrait de Dorian Gray » et j'ai trouvé cela gênant, comme si une partie de la pensée de l'auteur m'échappait.
Même si la fin est surprenante, j'ai beaucoup aimé ce roman que j'ai lu d'une traite et que je relirai certainement après avoir découvert « le coin plaisant ». C'est un livre très fort, un uppercut qui laisse exsangue quand on le referme. Hélas, comme toujours lorsqu'un roman me plaît, je trouve ma critique maladroite.
Un grand merci à NetGalley et aux éditions Fayard qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteur que je ne connaissais pas du tout.
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