Tout s'accorde pour inscrire le cocu, mari ou amant servile et bafoué, son créateur, scénariste ou metteur en scène prônant et exhibant son malheur, et le spectateur s'en délectant, dans la sphère du masochisme.
Il suffirait d'oublier cet "a priori" de "nature masochiste de la femme" et le masochisme de l'homme ne serait plus la manifestation de tendances féminines.
Enfin un dernier point fait d' "Exhibition N° 2" un film remarquable pour le sujet qui nous intéresse : il s'agit de la réaction de la dame dont l'esclave a reçu l'ordre de lécher les bottes. Elle refuse, puis devant les nouveaux sévices qui sont infligés à Jan, ne tarde pas à éclater en sanglots et à avoir une crise de nerfs. À Sylvia qui la questionne et la pousse dans ses derniers retranchements, son amie finit par avouer que "cela la dépasse". Je propose à l'éventuel Tartuffe, attiré par son titre et égaré dans ce livre, de méditer cette réponse.
Des symboliques "chaînes de l'amour" le masochiste veut être réellement entravé.
Fort du masochisme de ses victimes, le vampire n'hésite pas à leur imposer des pratiques d'exemplaire soumission dont l'évident symbolisme sexuel ne trompe, en l'occurrence, ni l'heureuse élue, ni le spectateur : dans "Dracula, prince des ténèbres" (Terence Fisher, 1965), Christopher Lee, après s'être entaillé la peau avec l'ongle de son auriculaire, invite Diana (Suzan Farmer) à sucer son sang. La fellation fait, on le sait, partie des techniques de base du masochisme féminin et Dracula, en dominateur accompli, ne saurait priver ses partenaires soumises d'un tel plaisir.
Le masochisme chevalin n'a pas de frontières, ni de temps, ni d'espace.
"Dans le masochisme, le cours typique de l'excitation sexuelle tend à réduire la tension pour l'empêcher de se résorber en un orgasme satisfaisant et la garder plutôt en puissance" (T. Reik). Au cinéma cela s'appelle le "suspens".
[...] la fessée est certainement la plus bourgeoise de toutes les perversions, une sorte d'encanaillement mondain toléré entre mari et femme.
OLIVIER - C'est surprenant quand même... C'est eux qui te disent, qui te dictent tes paroles...
ARIANE - C'est eux qui me demandent ce qu'il faut faire, puis c'est à moi d'améliorer, d'inventer... de rentrer dans leur folie, dans leur histoire...
[Extrait d'un dialogue de "Maîtresse", Barbet Schroeder]
Dans les près de cinq cents films que j'évoque dans cet essai, presque aucun ne montre, la grande majorité suggère. D'une certaine façon, ce livre est une archéologie de l'image au cinéma. Archéologie certes très orientée, hiérarchisation onirique de mes propres obsessions, regard inédit sur la transgression des images dans le septième art, création autant culturelle que populaire.