Description de l'importance de la Marine militaire en France à travers l'histoire et les hommes qui l'ont faite avec une grande érudition, clarté : facile à lire. Livre qui me servira de référence.
Commenter  J’apprécie         10
"M. de Suffren, très dur, très bizarre, extrêmement égoïste, mauvais coucheur, mauvais camarade, n'était aimé de personne, mais été apprécié, admiré de tous. C'était un homme avec qui l'on ne pouvait pas vivre, et il était surtout fort difficile à commander, obéissait peu, critiquait tout, déclamant sans cesse contre l'inutilité de la tactique, et se montrant au besoin le meilleur tacticien. Il en était de même de tout le reste, c'étaient l'inquiétude et la mauvaise humeur du génie et de l'ambition qui n'a pas ses coudées franches […]. Arrivé dans l'Inde, il ouvrit une scène nouvelle à nos armes, il y fit des prodiges qu'on n'a peut-être pas assez appréciés en Europe ; ce furent immédiatement des actes et des mœurs de commandement inconnus jusque-là, prenant tout sur lui, osant tout, imaginant tout, prévoyant tout."
On ne saurait mieux dépeindre l'étonnante personnalité du bailli, à qui certains ne pouvaient évidemment pardonner de bousculer les habitudes, surtout quand elles étaient mauvaises.
Tel était donc Lapérouse. Excellent marin, exerçant sur ses équipages une autorité bienveillante et ferme, on put mesurer celle-ci lors du drame de Tutuila où il sut éviter toute action de représailles. Il était doué de tous les talents nécessaires au très grand chef qu'il serait sans doute devenu en d'autres circonstances ; sa personnalité se révélait des plus attachantes. Foncièrement libéral au sens noble du terme, esprit d'un modernisme sans cesse en éveil, curieux de tout et de tous, bienveillant et éclairé, réaliste autant que soucieux de progrès matériel et moral, il peut être considéré comme l'un des modèles les plus accomplis de l'officier de marine des Lumières.