Citations sur Comédies, tome 2. Heautontimoroumenos - Phormion (12)
Que les pères sont des juges injustes envers tous les jeunes gens ! Ils trouveraient naturel que dès l'enfance nous naissions vieux et que nous n'ayons aucun goût pour les choses que comporte l'adolescence. Ils font la loi selon leur propre goût, celui qu'ils ont maintenant, non pas celui qu'ils avaient autrefois.
HEAUTONTIMOROUMENOS.
CHRÉMÈS : Oh, cesse, ma femme, de rebattre les oreilles des dieux en les remerciant de t'avoir rendu ta fille, à moins que tu ne juges de leur nature d'après la tienne, et que tu ne croies qu'ils ne comprennent rien sans qu'on le leur ait répété cent fois !
HEAUTONTIMOROUMENOS : Acte V, Scène 1.
PHORMION : On ne tend pas de filets pour prendre l'épervier ni le milan, qui nous font du mal ; on en tend pour prendre ceux qui sont innocents ; parce que les seconds peuvent rapporter quelque chose, tandis que pour les premiers, c'est du temps perdu.
PHORMION : Acte II, Scène 2.
P. S. : Ça ne vous rappelle pas, dans une certaine mesure, le fonctionnement de la police actuelle, bien que ces vers aient été écrits il y a presque 2200 ans ?
CHRÉMÈS : De tout ce qui m'entoure, je suis le seul bien que je possède.
PHORMION : Acte IV, Scène 1.
CHRÉMÈS : Ce n'est plus maintenant de l'argent qu'il s'agit, mais de la manière dont nous le donnerons au jeune homme au moindre risque. Car s'il a compris, une fois, dans quel état d'esprit tu étais, que tu es prêt à donner ta propre vie et tout ton argent plutôt que de te séparer de ton fils, oh là là, quelle brèche tu lui auras ouverte sur la voie de la débauche, et, pour toi, du même coup, tu en perdras tout plaisir à vivre. Car nous nous laissons tous entraîner par la facilité. Tout ce qui lui passera par la tête, il le voudra, et il ne se demandera pas si c'est bien ou mal ; il le demandera ; toi, tu ne pourras supporter de voir perdre et ta fortune et lui-même. Tu refuseras de donner ; il ira aussitôt à ce qu'il comprendra être le plus efficace sur toi ; il menacera sur-le-champ de te quitter.
HEAUTONTIMOROUMENOS.
DAVE : Comme c'est mal fait, que ceux qui sont les plus démunis doivent toujours ajouter quelque chose à la fortune des plus riches !
PHORMION, Acte I, Scène 1.
SOSTRATA
Sûrement, si tu n'y prends garde, Chrémès, tu seras cause de quelque malheur pour notre fils, et je m'étonne vraiment qu'une idée si absurde ait pu te venir à l'esprit, mon mari.
CHRÉMÈS
Ah ! tu es toujours bien femme. Ai-je de ma vie formé un seul projet que tu n'aies contrecarré, Sostrata? Et aujourd'hui même, si je te demandais en quoi consiste ma faute et pourquoi tu agis ainsi, dans cette affaire où tu me résistes si hardiment, tu ne saurais le dire, sotte que tu es.
SOSTRATA
Moi, je ne saurais le dire?
CHRÉMÈS
Si, si, tu le saurais. J'aime mieux dire comme toi que. d'avoir à recommencer la même discussion.
SOSTRATA
Ah! tu es injuste d'exiger que je me taise dans une circonstance aussi grave.
CHRÉMÈS
Je ne l'exige plus : parle. Je n'en ferai pas moins à ma tête.
SOSTRATA
Tu n'en feras pas moins?
CHRÉMÈS
Non.
Il faut bien accepter le danger avec le reste, ou bien renoncer à tout l'ensemble.
HEAUTONTIMOROUMENOS.
SYRUS
C'est une femme aimable et spirituelle que cette courtisane.
CHRÉMÈS
Oui.
SYRUS
C'est ce qui t'a semblé aussi? Et avec cela, elle est, par Hercule, d'une éclatante beauté.
CHRÉMÈS
Oui, elle est assez bien.
SYRUS
Ce n'est pas une de ces beautés comme il y en avait autrefois; mais pour le temps présent, elle est vraiment bien, et je m'étonne pas du tout que Clinia en soit fou. Mais il a un père avare, ladre, sec; c'est notre voisin. Ne le connais-tu pas? Bien qu'il roule sur l'or, il a contraint son fils à s'exiler en lui coupant les vivres. Sais-tu que cela s'est passé comme je te dis?
CHRÉMÈS
Comment ne le saurais-je pas? C'est un homme à envoyer au moulin.
SYRUS
Qui?
CHRÉMÈS
Je parle de ce pauvre esclave du jeune homme...
SYRUS (à part).
J'ai eu bien peur pour toi, Syrus.
CHRÉMÈS
Qui a laissé faire tout le mal.
SYRUS
Que pouvait-il faire?
CHRÉMÈS
Ce qu'il pouvait faire? Il devait trouver quelque expédient, imaginer quelques ruses pour procurer au jeune homme de quoi donner à sa maîtresse, et sauver, en dépit de lui-même, ce vieillard incommode.
SYRUS
Tu plaisantes.
CHRÉMÈS
Voilà ce qu'il aurait dû faire, Syrus.
SYRUS
Oh ! oh ! tu approuves, dis-moi, ceux qui trompent leurs maîtres?
CHRÉMÈS
A l'occasion, oui, je les approuve.
CLITIPHON
Comme les pères sont toujours injustes à l'égard des jeunes gens ! Il faudrait, d'après eux, que, dès le berceau, nous fussions d'emblée de vieux barbons, sans aucune attache aux plaisirs du jeune âge. Ils veulent nous régler d'après l'humeur qu'ils ont maintenant, et non d'après celle qu'ils ont eue autrefois. Pour moi, si jamais j'ai un fils, il peut être sûr qu'il aura en moi un père commode : il pourra m'avouer ses folies et compter sur mon indulgence. Je ne ferai pas comme le mien, qui a recours à l'exemple d'autrui pour m'étaler sa morale. Ah ! malédiction ! quand il a bu un coup de trop, comme il m'en raconte sur ses prouesses ! Et maintenant il vient me dire : « Profite de l'exemple d'autrui pour apprendre ce qui peut t'être utile. » Avec sa finesse, il ignore certainement combien je suis sourd à présent à ce qu'il me chante.