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Critique de pat823


pat823
11 décembre 2023
« La Sonate à Kreutzer » est un roman de Léon Tolstoï publié en 1889. L'auteur a alors 61 ans. le titre fait référence à la « Sonate pour violon et piano n°9 » de Beethoven qui avait bouleversé Tolstoï. Elle symbolise d'abord « la puissance dépravante de la musique », mais évoque surtout le noeud dramatique du récit, son point d'orgue.

Quatre personnages se trouvent dans un train pour un voyage de plusieurs jours. le narrateur n'est pas présenté. Il joue le rôle de facilitateur. Un homme sans âge aux cheveux blancs se confie. Il s'appelle Pozdnychev et raconte sa tragédie conjugale. C'est la confession d'une brute, rongée par la jalousie, et qui a tué sa femme.
Pozdnychev entame alors un long monologue contre l'institution du mariage, sur les leurres de l'amour, contre les femmes et leur don de manipulation. Jeune il était dépravé et menait une existence dissolue. Devenu trentenaire, il a cherché un pur amour et s'est marié.
Le narrateur, tel un psy bienveillant, l'interrompt parfois brièvement pour mieux le relancer.

Pozdnychev se lance dans une diatribe enflammée contre sa femme, contre la société, contre l'institution du mariage, avec des positions nihilistes et antinatalistes. Il cherche constamment à se défendre et à se justifier.
Il apparaît vite que ce couple était décalé. Deux êtres qui n'ont jamais pu synchroniser leurs aspirations, tant ils étaient dissemblables. Dans ses invectives, Pozdnychev se révèle misogyne, égoïste, tyrannique et ombrageux.

Arrive ce moment fatidique, inévitable, où il surprend sa femme en harmonie dans « la Sonate à Kreutzer » avec un autre homme, elle au piano, lui au violon. Persuadé d'être trompé et ne supportant pas de voir sa femme lui échapper, il commet son geste fatal.

Un livre très controversé dès sa parution. Tolstoï traverse une crise spirituelle et préconise la chasteté absolue comme seule voie vers le salut, comme idéal. Roman sur la séduction et la jalousie qui exprime une religiosité envahissante et pas mal de préjugés. Il assimile la femme à la tentation et la chair au vice. Il suffit de lire la postface qu'il a écrite en réponse aux nombreuses réactions pour s'en convaincre.
Il reste intéressant de lire ce qu'il se disait en 1889 en Russie tsariste sur le mariage arrangé, le mariage d'amour, sur les revendications féminines. Et cette lecture nous révèle que la mentalité n'a malheureusement pas beaucoup évolué en plus d'un siècle en matière de féminicide.

À noter aussi que Sophie Tolstoï, épouse de l'auteur et fidèle lectrice a répondu à ce qu'elle estimait être un violent réquisitoire contre l'amour charnel la visant directement en écrivant son propre roman « À qui la faute, roman d'une femme. » Celle qui vécut à l'ombre de l'écrivain avait néanmoins persuadé le tsar Alexandre 1er de ne pas interdire le roman de son mari.

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