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Citations sur Darwin et le darwinisme (8)

Les modes antidarwiniennes, voire antitransformistes (tels que la reviviscence du vieux discours créationniste sous des travestissements indéfiniment remaillés) reviennent périodiquement, ce qui signe leur caractère idéologique, en avançant des objections plus que centenaires. Si leur niveau scientifique inexistant les condamne aux yeux des spécialistes, le soutien qu’elles puisent dans des résistances ancestrales et organisées leur permet d’exercer néanmoins leur influence – en particulier aux États-Unis – sur un public insuffisamment instruit ou qui ne souhaite pas l’être.
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L’idée que les espèces vivantes dérivent les unes des autres à travers des variations transmises par voie de génération a mis exactement un demi-siècle – entre la publication de la Philosophie zoologique de Lamarck (1809), ouvrage qui n’est pas le premier, mais seulement le plus célèbre des écrits transformistes du naturaliste français, et celle de L’Origine des espèces (1859) de Darwin – à élaborer les fondements du transformisme moderne.
L’observation de la variabilité naturelle des organismes – matérialisée au niveau le plus simple par les différences interindividuelles – et de la transmission de variations organiques d’une plus grande amplitude chez des animaux et des plantes vivant à l’état domestique semble avoir été le point de départ de la construction par Darwin de sa théorie de la filiation des espèces.
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Darwin a mis plus de onze ans – de la troisième édition de L’Origine en 1861 jusqu’à la sixième et dernière en 1872 – à affiner ses réponses aux critiques dont la théorie de la descendance modifiée par sélection naturelle a été la cible. S’il s’est peu préoccupé des objections de Wilberforce et d’Owen, le premier tentant de réintégrer la sélection dans le sein de la théologie naturelle en lui déniant son rôle créateur, et le second de lui substituer une théorie de la dérivation des espèces à partir de types fixes inspirée de la morphologie idéaliste, de la philosophie de la nature allemande et d’un providentialisme des causes secondes, il s’est en revanche intensément attaché à répondre à celles qui lui paraissaient poser de véritables problèmes au niveau de l’application universelle du principe sélectif à l’interprétation des faits d’évolution.
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La sélection naturelle a ainsi sélectionné les instincts sociaux, qui à leur tour ont développé des comportements et favorisé des dispositions éthiques ainsi que des dispositifs institutionnels et légaux anti-sélectifs et anti-éliminatoires. Ce faisant, la sélection naturelle a travaillé à son propre déclin (sous la forme éliminatoire qu'elle revêtait dans la sphère infra-civilisationnelle), en suivant le modèle même de l'évolution sélective - le dépérissement de l'ancienne forme et le développement substitué d'une forme nouvelle: en l'occurrence, une compétition dont les fins sont de plus en plus la moralité, l'altruisme et les valeurs de l'intelligence et de l'éducation. Sans rupture, Darwin, à travers cette dialectique évolutive qui passe par un renversement progressif que nous avons nommé l'effet réversif de l'évolution, installe toutefois dans le devenir, entre biologie et civilisation, un effet de rupture qui interdit que l'on puisse rendre son anthropologie responsable d'une quelconque dérive en direction des désastreuses "sociologies biologiques".
Cette remarquable dialectique du biologique et du social, qui se construit pour l'essentiel entre les chapitres III, IV, V et XXI de "La Filiation" [The Descent of Man and Selection in Relation to Sex] et qui, en plus de s'opposer à toutes les conduites oppressives, préserve l'indépendance des sciences sociales en même temps qu'elle autorise et même requiert le matérialisme éthique déductible d'une généalogie scientifique de la morale, n'a été reconnue dans toute sa force logique qu'à partir des années 1980. Le continuum biologico-social darwinien, dont une bonne métaphore didactique est l'image topologique de la torsion du ruban de Möbius, est un continuum réversif, impliquant donc un passage progressif au revers de la loi évolutive initiale - la sélection naturelle, en tant que mécanisme en évolution, se soumettant elle-même, de ce fait, à sa propre loi.
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[D]ans l’état de « civilisation », résultat complexe d’un accroissement de la rationalité, de l’emprise grandissante du sentiment de « sympathie » et des différentes formes morales et institutionnelles de l’altruisme, on assiste à un renversement de plus en plus accentué des conduites individuelles et sociales par rapport à ce que serait la poursuite pure et simple du fonctionnement sélectif antérieur : au lieu de l’élimination des moins aptes apparaît, avec la civilisation, le devoir d’assistance qui met en œuvre à leur endroit de multiples démarches de secours et de réhabilitation ; au lieu de l’extinction naturelle des malades et des infirmes, leur sauvegarde par la mobilisation de technologies et de savoirs (hygiène, médecine, exercice corporel) visant à la réduction et à la compensation des déficits organiques ; au lieu de l’acceptation des conséquences destructrices des hiérarchies naturelles de la force, du nombre et de l’aptitude vitale, un interventionnisme correcteur qui s’oppose à la disqualification sociale.
Par le biais des instincts sociaux, la sélection naturelle, sans « saut » ni rupture, a ainsi sélectionné son contraire, soit : un ensemble normé, et en extension, de comportements sociaux antiéliminatoires – donc antisélectifs au sens que revêt le terme de sélection dans la théorie développée par ‘L’Origine des espèces’ –, ainsi, corrélativement, qu’une éthique de la protection des faibles traduite en principes, en règles de conduite et en lois.
L’émergence progressive de la morale apparaît donc comme un phénomène indissociable de l’évolution, et c’est là une suite normale du matérialisme de Darwin et de l’inévitable extension de la théorie de la sélection naturelle à l’explication du devenir des sociétés humaines.
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[L]e débat qui s'ouvre [dans le sillage de la parution de 'L'Origine des espèces'] prend très vite une ampleur exceptionnelle : bataille de comptes rendus, revendication d'antériorité, discussions théologiques, réunion houleuse, enfin, de la British Association for the Advancement of Science à Oxford (...) qui voit s'affronter T. H. Huxley (que l'on appellera par la suite « le bulldog de Darwin ») (...) et l'évêque Samuel Wilberforce (...), coupable d'une apostrophe célèbre dans laquelle il demande à son interlocuteur s'il s'apparente au singe par sa grand-mère ou par son grand-père.
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La théorie de l'évolution étant une théorie phylogénétique - soulignant de ce fait la nécessité du raisonnement phylogénétique lui-même comme voie unique de compréhension profonde des phénomènes biologiques observables -, l'ensemble de la biologie moderne, en tant qu'étudiant dans chacune de ses régions un certain ordre de conséquences de l'évolution, devrait reposer sur la connaissance et la théorie de celle-ci comme sur son socle intellectuel indispensable et légitime.
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La mise en accusation, contre l'évidence logique, historique et textuelle, d'un Darwin rendu responsable, suivant l'opportunité, de tous les fléaux inégalitaires et suprématistes qui ont défiguré le XXè siècle ne saurait être totalement innocente chez ceux qui détiennent en principe la possibilité d'accéder aux sources les plus propres à l'invalider. L'un des programmes d'étude de l'épistémologie historique des discours circum-darwiniens pourrait être, dans la période contemporaine, l'analyse des stratégies sous-jacentes à ce gendre d'obstination.
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