Ce chemin provoqué par l'absence prématurée place souvent les mères en porte-à-faux. Elles se sentent pleinement et douloureusement mères d'un enfant qui n'est pas là et bien souvent, personne ne leur reconnait cette maternité.
Il arrive d'un autre monde et notre devoir est peut être de lui permettre de souffler, de se poser, de découvrir ceux qui l'aiment déjà, de trouver ses repères.
« Tu enfanteras dans la douleur » n’est donc pas une punition mais une constatation : le chemin sera plus difficile, c’est un fait ! Je dirais, sous forme de boutade, que lorsque l’on cueille et que l’on mange le fruit de l’arbre avant qu’il ne soit mûr, on ne peut que constater que la digestion est plus difficile et qu’on a mal au ventre !
« Lors d’une formation sur l’accouchement dans l’eau que je donnais à des sage-femmes, l’une d’elles m’exprima son désarroi face aux hémorragies de la délivrance suite à des naissances dans l’eau. C’est effectivement un constat qui est souvent fait. Je l’attribue d’un côté à la perturbation de la mère, lorsqu’on lui demande de sortir de l’eau, mais également aux conséquences de l’effet de l’ANP. Il se peut que son action sur l’inhibition de la sécrétion d’ocytocine ne se soit pas fait sentir avant l’expulsion du bébé, mais qu’elle intervienne juste pour la délivrance. Il faut donc en tenir compte et être très prudent avec les femmes, que l’on respecte dans leur réflexe expulsif alors qu’elles sont dans l’eau depuis au moins une heure et demie. Que ferais-t-on si l’inertie utérine survient lors de la délivrance ? »
Dans ces conditions, aucune femme n'a besoin d'apprendre ni à respirer ni à pousser ni à se mettre dans telle ou telle position. Son corps sait.
Je retrouve ce sentiment d’échec, « de ne pas avoir été capable de mettre son enfant au monde », chez certaines femmes qui ont eu une rachi-anesthésie pour permettre d’aider l’expulsion par une ventouse par exemple. Pourtant, il ne leur a manqué que quelques millimètres de passage et quelques minutes de contractions ! Cela suffit pour qu’elles gardent la frustration de ne pas avoir pu aller au bout, de ne pas avoir pu achever ce qu’elles avaient commencé. Pour d’autres, ce sera une épisiotomie qui se fera l’écho de ce bout de chemin manquant...
Il y a un nombre impressionnant de dépressions graves du post-partum en France. Ces dépressions portent atteinte au lien mère/enfant. Pourtant ce n’est pas la femme qui est incapable, mais plutôt l’image médiatisée qu’elle cherche à atteindre qui est inconcevable, inaccessible. L’isolement de la femme durant cette période est insensé.