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Citations sur Paris ne finit jamais (14)

Je lis les mots du poète Ullán sur Marguerite Duras et je la revois comme si c’était hier : « […] Allant et venant entre son verre et sa cigarette, sa toux spasmodique et ses silences interminables. […] ». Je garderai à jamais le souvenir d’une femme violemment libre et audacieuse, qui incarnait en elle à tombeau ouvert […] cette désolation dont sont faits les écrivains les moins exemplaires, les moins académiques et les moins édifiants, ceux qui ne cherchent pas à donner à tout prix une bonne image, […] les seuls dont nous n’apprenons rien, mais également les seuls qui ont le rare courage de s’exposer littéralement dans leurs écrits […] et que j’admire profondément parce qu’ils sont les seuls à jouer le jeu à fond et me paraissent de vrais écrivains.
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Après tout, c'est une question de patience, je serai, un jour, un bon écrivain. Mais je me souviens aussi que j'ai été, à cet instant, assailli par une foule de questions : Et pourquoi, diable, ne suis-je pas déjà ce bon écrivain que je serai un jour ? Que me manque-t-il pour l'être ? Vie et lectures ? Est-ce ce qui me manque ? Et si je n'arrive pas à être, un jour, un bon écrivain ? Que serais-je alors ? Serai-je toute ma vie un jeune homme sans expérience ni lectures, incapable d'écrire bien ? Pourrai-je le supporter ?
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Le passé, disait Proust, non seulement n'est pas fugace mais en plus, il ne change pas de place. Même chose pour Paris, qui n'est jamais parti en voyage. Et comme si c'était trop peu, Paris est interminable et ne finit jamais.
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Comme j'étais jeune, je me sentais obligé de croire que j'avais un avenir, même si je n'en avais pas une idée très claire.
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Par ailleurs, je crois que j'ai le droit de me voir différemment de la façon dont les autres le font, de me voir comme j'ai envie de me voir et de ne pas être obligé d'être cette personne que les autres ont décidé que je suis.
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Ce 9 avril, j’allais traverser le boulevard Saint-Germain avec Marguerite Duras et Raúl Escari quand, tout à coup, une grande voiture noire, presque funéraire, qui, en tout cas, n’avait rien de printanier, a freiné sèchement et s’est arrêtée à notre hauteur. J’ai regardé, et ai pu voir à l’intérieur Julia Kristeva, Philippe Sollers, Marcelin Pleynet et une quatrième personne que je n’ai pas identifiée. Sollers a baissé la vitre de la voiture et a parlé quelques petites secondes avec Marguerite. Puis la voiture a démarré […]. Marguerite a alors dit : « Ils partent en Chine. »
J’ai pensé, une fois de plus, qu’elle parlait dans son français supérieur. Ils partent en Chine, a répété Raúl d’un ton très solennel et ironique, et je n’ai pu m’empêcher d’éclater joyeusement de rire.
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Un matin d'hiver, je me promenais avec Arrieta dans le Jardin du Luxembourg quand, dans une allée secondaire, nous avons aperçu un oiseau noir et solitaire, presque immobile, lisant le journal. C'était Samuel Beckett. Vêtu rigoureusement de noir des pieds à la tête, il était assis sur une chaise, figé comme une statue, il avait l'air désespéré, il faisait peur. Et on avait même du mal à croire que c'était lui, que c'était Beckett. Jamais je n'avais pensé que je pourrais le rencontrer. Je savais que ce n'était pas un classique mort, mais quelqu'un qui vivait à Paris, toutefois je me l'étais toujours imaginé comme une obscure présence survolant la ville, nullement comme quelqu'un qu'on rencontre en train de lire désespérément un journal dans un vieux parc solitaire et froid. De temps à autre, il tournait une page avec une telle irritation et une telle énergie que si le Jardin du Luxembourg tout entier s'était mis à trembler, nous n'en aurions guère été étonnés. Arrivé à la dernière page, il avait l'air à la fois absorbé et absent. Faisait encore plus peur. "C'est le seul à avoir eu le courage de nous montrer que notre désespoir est si grand que nous n'avons même pas de mots pour l'exprimer", a dit Arrieta.
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A propos des panthéons, la phrase la plus ironique que je connaisse - peut-être jamais dépassée - est l'épitaphe que Marcel Duchamp écrivit pour lui-même et qu'on peut lire sur la stèle de sa tombe : D'ailleurs, c'est toujours les autres qui meurent.
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"Un conseil, voilà ce qu'il me faut, de l'aide pour le roman." Cette fois, Marguerite a parfaitement compris. "Ah, un conseil" a-t-elle dit, et elle m'a invité à m'asseoir dans l'entrée (comme si elle me trouvait très fatigué), a éteint lentement sa cigarette, l'a posée dans le cendrier qui était là et s'est dirigée, de façon un peu mystérieuse vers son bureau, dont elle est revenue, une minute plus tard, avec une feuille de papier qui ressemblait à une ordonnance de médecin et contenait des instructions qui pouvaient - m'a-t-elle dit ou ai-je cru comprendre - m'aider pour écrire mes romans. J'ai pris la feuille et suis directement sorti dans la rue. Dans la rue Saint-Benoît, j'ai lu, peu après, les instructions et ai senti tout le poids du monde fondre d'un seul coup sur moi, je me souviens encore aujourd'hui de l'immense panique - du frisson qui m'a secoué, pour être plus précis - qui s'est emparé de moi quand je les ai lues :
1. Problèmes de structure. 2. Unité et harmonie. 3. Thème et histoire. 4. Le facteur temps. 5. Effets textuels. 6. Vraisemblance. 7. Technique narrative. 8. Personnages. 9. Dialogue. 10. Cadres. 11. Style. 12. Expérience. 13. Registre linguistique.
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Je crois que je ne vais pas tarder à m’absenter d’ici. Je m’en irai avec ma conscience qui a toujours été pour moi une ironie croissante qui, à mesure qu’elle se fortifiait et grandissait, tendait en même temps et paradoxalement à disparaître. Chose que j’ai découverte à mesure que je vivais et que s’agrandissait cette conscience, qui ne serait rien sans l’ironie. Je m’en irai d’ici pour me dissoudre, me dissocier, me désintégrer, réduire à néant tout désir de personnalité ou de conscience, toute nostalgie de Paris. Après tout, ironiser, c’est s’absenter.
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