Cimetière de l'effroi

Angoisse n°1 - de 1954 ; Soixante neuf ans. Mon exemplaire se porte assez bien extérieurement et la couverture naïve dessinée par Michel Gourdon fait sourire même si elle n'a, au fond, aucun rapport avec le contenu du récit de Donald Wandréi.
L'intérieur du livre, c'est autre chose et je tourne les pages d'un récit titanesque avec délicatesse. Beaucoup de ces pages sont d'ailleurs déchirées .
Je me fiche de savoir qui a influencé qui, qui a corrigé qui. Ces considérations m'ont toujours ennuyé et c'est pour cela que je saute systématiquement les préfaces pour ne les lire qu'après avoir lu le livre lui-même !
Ici, on est pris dès les premières lignes dans ce déchaînement insensé de fait que seule la découverte d'un artefact a déclenché et on suit avec intérêt l'enquête du professeur Graham, Indiana Jones des temps immémoriaux plongé en pleine résurgence des titanesques anciens. On se laisse alors emporter par un maelstrom de description hallucinées dans les méandres de l'ultra temps et on se plaît à rêver d'une époque où toutes les audaces étaient permises et publiées.

Voici plutôt une curiosité lovecraftienne qu'un roman vraiment passionnant. En effet, Donald Wandrei fait partie du cercle des correspondants du maître de Providence. Ils échangent longuement au sujet de cette première oeuvre, dont H. P. Lovecraft, toujours prompt à soutenir les jeunes écrivains, fera l'éloge, en particulier la seconde partie pour "sa poésie cosmique". Avec la volonté d'aider Wandrei, il soulignera les nombreuses incohérences, les scènes trop abruptes, la psychologie peu crédible. Malgré les améliorations apportées par le mentor, "le cimetière de l'effroi" comporte encore trop de défauts pour être vraiment apprécié. Les amateurs retrouveront néanmoins une statuette aux inscriptions incompréhensibles, une architecture géométrique plus ancienne que les premières civilisations, et l'influence de créatures venues des étoiles... Étonnamment, alors que Lovecraft est encore un parfait inconnu en France, ce roman de Wandrei sera traduit et constituera la première publication de la fameuse collection Angoisse du Fleuve Noir en 1948. Les voies de l'édition sont mystérieuses...

Avec August Derleth, Donald Wandrei avaient créé Arkham House pour faire paraître les textes de Lovecraft. Ce livre s'inscrit dans la série des pastiches inspirés du Maître. Cependant, s'il en a les ingrédients, il n'en a pas la saveur... A bien y regarder, on sent qu'il s'agit davantage d'un collage de nouvelles avec un fil rouge. Une étrange statuette a été retrouvée dans un cimetière et provoque une série de catastrophes puis la fin du monde qui pourrait être évitée par un courageux savant... A la fois fantastique et SF, ce roman n'atteint hélas pas la dimension cosmique des récits d'HPL.