Nous ne sommes pas en France, et vous feriez mieux de vous concentrez sur votre travail.
Mais si vous voulez jouer, voici un vieux proverbe, britannique celui-ci : " les belles paroles ne beurrent pas les panais.".
Je me demande ce qu'il a vu, reprit Miss Madoc.
Mon grand-père connaissait un homme qui s'était rencontré lui-même. Il était sorti pour faire quelque chose qu'il n'aurait pas dû chercher à faire - je ne me souviens pas de quoi il s'agissait - et il s'est retrouvé face à son double dans la clarté de la pleine lune. Mon grand-père m'a raconté qu'on aurait dit Balaam et son ânesse, mais je ne sais pas pourquoi, car Balaam montait son ânesse, alors que cette apparition était seule, et à pied. Et la lune était brillante - il se voyait nettement. Une sainte terreur s'empara de lui, il fit demi-tour et prit les jambes à son cou, ne s'arrêtant de courir qu'une fois arrivé chez le pasteur. Et tout le temps qu'il courut, il entendit le bruit de ses propres pas le poursuivre. Mon grand-père m'a assuré qu'à compter de ce jour, il n'avait plus été le même homme. Lui qui avait toujours abusé de l'alcool et des femmes, il devint un homme sobre et respectueux de Dieu. Croyez-vous que Mr. Harsch ait vu quelque chose dans ce genre ?
On peut pousser à bout n'importe qui jusqu'à ce qu'il perde les pédales. J'ai vu une voiture descendre Penny Hill à fond de train quand j'étais gosse - les freins qui avaient lâché, d'après ce qu'on a dit -, elle s'est écrasé contre un gros orme de la haie. Je suppose que c'est exactement ce qui se passe quand un type se suicide - les freins lâchent et il perd le contrôle, comme en voiture.
Plus tard, il se remémora la soirée et s'interrogea. Avait-il été stupide ? A quel moment avait-il perdu le fil ? Jusqu'à quel point avait-il fermé les yeux sur les légers remous plissant la calme surface ? Jusqu'à quel point l'avait-on induit en erreur ? Il était très difficile de répondre à ces questions. En surface, le calme était total.
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Je ne sais pas. Je sens que j'ai atteint la fin d'une période de ma vie. J'ai lu quelque part que toute fin est un nouveau commencement. En ce moment, je suis devant un mur.
Je suis si heureuse que vous vous soyez confié à moi, s'empressa de dire Janice avec douceur. Je trouve que vous êtes merveilleux. Mais... oh ! Mr Harsch, vous n'allez pas partir !
Il eut l'air surpris.
- Pourquoi avez-vous pensé à cela ?...
- Je ne sais pas... on aurait dit... que vous faisiez vos adieux.
Plus tard, elle se souviendrait de cette phrase et regretterait de l'avoir prononcée.
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De gros nuages noirs filant dans le ciel où soufflait un vent - très haut, imperceptible au niveau du sol. Étrange de voir courir les nuages alors qu'aucune feuille ne bougeait dans la haie ou dans les saules.
Des forces invisibles poussant les hommes. Cette idée lui traversa l'esprit, teintée, comme l'étaient souvent ses pensées, par quelque chose de plus profond que la mélancolie, de plus austère que le sarcasme.
Pendant qu'il hésitait, les feux changèrent une nouvelle fois. Il tourna le dos au carrefour et s'engagea dans Ramford Street.
Il venait, sans le savoir, de prendre la décision capitale de sa vie. Parce qu'à cet instant précis le feu était passé du vert à l'orange, trois personnes allaient mourir, et la vie de quatre autres devait en être profondément et radicalement bouleversée. Pourtant rien dans son esprit ne le mit en garde. Et d'ailleurs - qui sait ? - un avertissement n'aurait peut-être rien changé.
Il fit quelques pas dans la rue puis la traversa. Là encore, il dut prendre une décision, mais cette fois elle fut presque immédiate.
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S'il avait traversé à cet instant beaucoup de choses auraient pu se dérouler différemment. Pourtant le moment passa sans que rien le distingue d'autres moments.
Je respecte ce qui est digne de respect. Je respecte la justice. L'honneur de celui à qui l'honneur est dû maintenant que j'ai présenté mes objections , je suis prêt à faire ma déclaration solennelle. P 62-63