Ce roman là, Belfond me l'a envoyé il y a plusieurs mois déjà et il est resté longtemps sur ma table de chevet, un peu effrayé que j'étais par les 500 pages de ce pavé terriblement ambitieux, qui d'après le 4ème de couverture, convoquait à la fois le récit historique, le conte gothique et d'épouvante, le roman amoureux, de la fable philosophique, et d'autres encore.
Pour un premier roman, voilà qui tient de l'ambition, voire de la démesure. Et de la démesure, l'auteur,
Jack Wolf semble en possèder allégrement. Transexuel ( ancienne femme devenue homme après plusieurs opérations) , père de deux enfants, écrivain et professeur passionné par la littérature du XVIIIème siècle, son
Misericordia semble effectivement provenir de trois sicèles en arrière, tant ce genre de roman, foisonnant, baroque, et même parfois barré, n' a pas grand chose en commun avec un roman d'aujourd'hui.
Misericordia est un Objet Littéraire Non Identifié, et c'est cette singularité qui en fait son charme, même s'il faut parfois avoir le coeur ( et les tripes ) bien accrochées pour suivre certains passages, bien gores et à la limite de l'insoutenable.
il faut dire que son héros Tristan Hart est bien torturé et victime de tourments intérieurs assez intenses : Compulsif et sujet aux hallucinations un peu étranges, il a 20 ans quand il quitte sa campagne du Berkshire et son ami d'enfance Nathaniel pour rejoindre Londres et l'enseignement du prestigieux Dr
William Hunter. Etudiant surdoué, obsédé par la relation entre le corps et l'âme, son ambition de chirurgien est de soulager la souffrance, en ces temps de science balbutiante ( nous sommes en 1760).
Mais, dans l'intimité de son cabinet, il se rend compte qu'il apprécie particulièrement disséquer les cadavres et entre deux vivisections torture aussi des femmes pour jouir de leurs cris de douleur et découvre ainsi le plaisir extrême qu'il prend à infliger la douleur.
Ce plaisir malsain à infliger la douleur, forcément on peut avoir quelques difficultés à la comprendre, mais c'est le grand talent de Wolf de réussir à rendre passionnant les pensées intimes de cet être particulièrement malaisant et qu'une rencontre amoureuse va entrainer sur une relation bien particulière...
Enfin, je n'en dis pas plus, pour ne pas gacher le plaisir de ce roman foisonnant, lyrique, qui plonge parfois certes dans le grotesque, mais qui arrive toujours à se rattraper aux branches, grâce au talent de narration de l'auteur, à son sens du rythme et des rebondissements. Une expérience un peu extrême et un peu roborative, mais qui vaut largement la peine d'être tentée, tant trop souvent la littérature nous laisse sur notre faim !!
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