Ce roman suit sur quatre générations les femmes de la famille Ermoza, une famille séfarade de Jérusalem, enrichie par une merveilleuse épicerie fine dont on goûte avec délice les amandes, les loukoums, le miel...
Et pourtant, plus d'amertume que de sucre dans la vie de ces femmes. Toutes sont poursuivies semble-t-il par une malédiction : à chaque génération, elles doivent vivre un désolant mariage sans amour. À chaque génération, le mari est amoureux d'une autre femme, d'une femme interdite, et il épouse, le coeur froid, celle qui sera une bonne femme au foyer et la mère de ses enfants...
Et ces femmes malheureuses tentent malgré tout de garder la face, de préserver leur dignité par un strict respect des convenances, par une solide appartenance à la communauté, qui se traduit dans des préjugés racistes, et puis surtout : par l'empire exercé sur leurs fils.
(Mais ici, pas de plaisanteries sur les mères juives.)
Et on assiste avec consternation à cette fabrication du malheur, mise en parallèle avec la naissance de l'État d'Israël.
J'ai aimé la façon dont les récits s'entremêlent, se transmettent d'une femme à une autre, et comment l'histoire familiale se mêle à
L Histoire.
J'ai été étonnée par la place infime réservée au génocide juif en Europe (deux phrases), et même choquée par l'expression "les rescapés venus des camps de personnes déplacées en Europe". Déplacées !
Par contre j'ai trouvé intéressants les choix opérés par la jeune génération : lutte armée ou action politique ? Ou bien désintérêt total pour la cause, au profit du rêve américain ?
Quelques passages plus drôles, tout de même : alors que la soeur aînée s'est bagarrée dans la foule pour avoir une chance d'apercevoir
Paul Newman, la benjamine, elle, guette le passage de Ben Gourion...
Est-ce qu'elles sont sympathiques, ces femmes ? Eh bien, pas toutes. Mais passionnantes, sans conteste.
Traduction irréprochable de
Léa Drouet, conservant le cachet des expressions ladino, "peshkado y limon" !
Challenge Globe-trotter (Israël)