Une très belle rencontre, j'ai tout simplement adoré ce roman. Beaucoup de beauté dans toute cette violence. Dès les premières lignes, je me suis laissée emporter par cette histoire, emprunte de mystère, de magie, mais en même temps très réelle avec toutes ces expressions espagnoles qui se passent de traduction, le regard de l'auteur sur le monde, la violence décrite.
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Un voyage dans le temps et l'espace, qui m'a transportée, par un beau matin de printemps, à
San Perdido au Panama dans le bidonville de Lagrima, en Juin 1946.
La très belle couverture colorée cache un monde violent où règne le marché noir, la corruption, la misère, la violence et la prostitution. Un monde mené par des hommes cruels, manipulateurs, dominateurs, animés par la soif du pouvoir. Pas très réjouissant.
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Mais au milieu de toute cette noirceur, une lumière : celle de Yerbo, un être à part.
« Qu'est-ce qu'un héros, sinon un homme qui réalise un jour les rêves secrets de tout un peuple ? »
Comme toutes les légendes, il y a une part de mensonge et une part de vérité.
Qui était Yerbo Kwinton ? Un assassin ou un justicier ? Un ange gardien ou ange vengeur ? Un héros, un sorcier ou un homme bon, tout simplement ?
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Il n'est qu'un tout petit garçon lorsque, sortant de la forêt tropicale, il apparaît pour la première fois dans la décharge à ciel ouvert de
San Perdido. Surnommé « la Langosta », cet enfant muet capte tout de suite l'attention par la douceur bienveillante de son regard bleu qui vous pénètre, son attitude calme et sereine qui soulage et rassure, ses mains démesurées et puissantes aux pouvoirs apaisants ou terrifiants. Fait très étonnant et emprunt de mystère : lorsqu'il apparaît, les cormorans et les chiens fuient la décharge et ne reviennent qu'après son départ.
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« Les années qui suivent ressemblent aux pages d'un livre déroulant une histoire ». Yerbo interroge, interpelle par son attitude mutique et discrète. Telle une ombre, il surgit aux endroits les plus improbables et disparaît, comme par magie. « C'est une trace invisible, mais indélébile. C'est un sentiment diffus, une appréhension obscure, la sensation d'un danger. » A chaque rencontre, il laisse une marque.
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Un autre point très présent dans ce roman : c'est la présence de personnages féminins forts, attachants et fiers, comme la généreuse et bienveillante Félicia, la trop belle Hissa, l'énigmatique et intelligente Madame, l'ensorcelante et voluptueuse Yumna.
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L'auteur signe un excellent premier roman avec une ambiance très colorée et vivante. L'intrigue est prenante, parfaitement maîtrisée jusqu'à la dernière ligne, le héros et les personnages secondaires sont bien travaillés, émouvants, altruistes ou au contraire, méprisables, vicieux, voire abjects. Je vous conseille très fortement de partir au Panama, à
San Perdido plus exactement, à la découverte de la légende de Yerbo Kwinton.
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