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Critique de Lismonde


Des émissions sur France Culture à écouter et réécouter, et surtout un livre à lire, car c'est le tout dernier de Stefan Zweig, et c'est vraiment un chef d'oeuvre pour son évocation de l'Europe intellectuelle et cultivée de l'entre deux guerres où l'on voit passer les plus grands intellectuels de son temps, en particulier Romain Rolland dont il partageait le pacifisme. Alors qu'il était un des phares de cette culture européenne faite d'échanges et de cosmopolisme, Zweig considérait qu'elle était en voie de disparition.

Et rien n'est plus saisissant que la toute dernière page de ce livre où Stefan Zweig évoque le retour dans la rue derrière lui de "l'ombre de la guerre" qui ne l'a jamais quitté depuis la dernière guerre, "voilant de deuil chacune de ses pensées, de jour et de nuit". Ce "monde d'hier", il en poste le manuscrit à son éditeur en février 1942. Nous sommes au Brésil à Pétropolis (à 100 kms à l'ouest de Rio, dans les montagnes). Et le lendemain de cet envoi, Stephan Zweig se donne la mort avec sa Lotte, sa compagne qui ne veut pas lui survivre. En novembre, il avait fêté ses soixante ans.

Petropolis, c'est pourtant une superbe villégiature où la bourgeoisie carioca possède de magnifiques résidences - c'est la montagne, on vient y prendre le frais - et fin connaisseur de ce pays qui l'avait toujours bien accueilli, Zweig avait aussi consacré un lumineux essai sur toute l'histoire du Brésil "Le Brésil terre d'avenir", dont je ne peux trop recommander la lecture. Quand on découvre le charme de Petropolis et ce livre plein d'espérance, on a vraiment du mal à comprendre comment Zweig est poussé au suicide. Mais en 1942, il est de plus en plus désespéré par l'évolution de la situation en Europe. Même l'écrivain Georges Bernanos, lui aussi en exil, auquel il rend visite quelques jours auparavant ne réussira pas à le dissuader de commettre ce geste fatal.

article publié sur mon blog le 26 sept 2012

Pour mémoire, un autre grand intellectuel s'est lui aussi suicidé en cette même année en juillet 1942, le grand philosophe Walter Benjamin, mais lui était sur le chemin de l'exil. Tragique ironie de l'histoire, trois jours avant son départ, on change les lois régissant le sort des étrangers, et il ne peut plus obtenir le visa nécessaire pour passer la frontière Il s'est donné la mort dans la nuit qui a suivi son arrestation à Port Bou, à la frontière espagnole, pour ne pas tomber aux mains de la Gestapo.

A Port Bou, un monument de l'artiste Dani Karavan commémore ce "passage" de Benjamin.
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