Une insurrection, nous ne voyons même plus par où ça commence. Soixante ans de pacification, de suspension des bouleversements historiques, soixante ans d’anesthésie démocratique et de gestion des événements ont affaibli en nous une certaine perception abrupte du réel, le sens partisan de la guerre en cours. C’est cette perception qu’il faut recouvrer, pour commencer.
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Il est désormais de notoriété publique que les situations de crise sont autant d’occasions offertes à la domination de se restructurer.
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Deux siècles de capitalisme et de nihilisme marchand ont abouti aux plus extrêmes des étrangetés, à soi, aux autres, aux mondes. L’individu, cette fiction, se décomposait à la même vitesse qu’il devenait réel.
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Ne plus attendre, c'est d'une manière ou d'une autre entrer dans la logique insurrectionnelle.
Il n'y a plus à réagir aux nouvelles du jour, mais à comprendre chaque information comme une opération dans un champ hostile de stratégies à déchiffrer, opération visant justement à susciter chez tel ou tel, tel ou tel type de réaction ; et à tenir cette opération pour la véritable information contenue dans l'information apparente.
Décider la mort de la civilisation, prendre en main comment cela arrive : seule la décision nous délestera du cadavre.
La famille n'existe comme famille, c'est-à-dire comme enfer, que pour celui qui a renoncé à en altérer les mécanismes débilitants, ou ne sait comment faire.
Devenir autonome, cela pourrait vouloir dire, aussi bien : apprendre à se battre dans la rue, à s'emparer des maisons vides, ne pas travailler, à s'aimer follement et à voler dans les magasins.
Le décomposition de toutes les formes sociales est une aubaine.
Notre histoire est celle des colonisations, des migrations, des guerres, des exils, de la destruction de tous les enracinements. C’est l’histoire de tout ce qui a fait de nous des étrangers dans ce monde, des invités dans notre propre famille.