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3.61/5 (sur 9 notes)

Nationalité : Roumanie
Né(e) à : Buziaş , le 29/11/1962
Biographie :

Rodica Drăghincescu est une poétesse, romancière, essayiste et traductrice francophone d’origine roumaine, née à Buziaş le 29 novembre 1962.

Auteur bilingue roumain-français, porte-drapeau de la nouvelle génération d’écrivains roumains, « la '90 », une génération d’auteurs non-conformistes, provocateurs et subversifs, issus de la chute du régime politique de Nicolae Ceaușescu.

Membre de l’Union des écrivains roumains, de l’Association des écrivains de Bucarest, de la Société des écrivains allemands Die Kogge, de la Maison des écrivains de Paris, de la SGDL Paris.



Source : Wikipédia
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Bibliographie de Rodica Draghincescu   (5)Voir plus

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Citations et extraits (9) Ajouter une citation
La ville, lorsque l'homme est déprimé, a l'air d'un sans-abri. Je rentre chez moi. Un verre de cognac me ferait du bien.
(p. 13)
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Le vide est un merveilleux atermoiement, une sorte de faux-fuyant, d'inter-espace, de son qui ne réclame personne, à égale distance entre le récepteur et l'émetteur – auteur. Le sens de la responsabilité s'accroît dans ces conditions.
(p. 214)
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Brouillard, lamentation, soumission, vacarme…
Le cycliste fait des signaux,
attend un désir, une détente bienvenue
devant une vitre brisée.
(p. 39)
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Rodica Draghincescu
ASTRUM

Voilà la grande rue du village,
comme une vieille vache maigre, jaunâtre,
dont le meuh perçant traverse les légendes et les âges,
à la recherche de son veau :


à droite, l’église sonne le midi, d’une cloche édentée,
à gauche, la bodega ferme pour cause de décès
c’est à ce moment-là que les villageois
se mettent à genoux à table et se signent pour la journée.
 
Ils sont vieux et pleins de peaux
appuyés les uns contre les autres,
inexacts et inexpressifs,
pelote de têtes et pieds fictifs,
dont le fil est embrouillé:
 
Comme autrefois, à la foire de campagne,
un samedi, lors du défilé de la fête nationale,
quand les chars, tambours et trompettes militaires
se sont mis à battre la cadence et à parader
………………………………………………………………………….
et alors,
alors,
par mégarde,
dans un instant fatidique,
les gitans ont perdu leurs ours et chevaux dressés…
………………………………………………………………………….
Le cumulus de museaux, sabots, griffes, crinières et poussières redressées,
résorbant en lui cris, trots, grognement, fugue et folie féerique,
a déraciné le monument des fils et filles martyrisés par la guerre
et l’a traîné par-dessus les blancs de mémoire des héritiers…>
 
À l’heure où le zéphyr, sortant du royaume  
où se lève l'étoile du soir, où le soleil éteint ses derniers feux,
le cumulus se changea en tornade équestre, plantigrade,
instinct de fuite fatale, pirouette géante de gens et d’animaux
volant dans les airs, les cous tendus, les yeux écarquillés,
emportant les noms des morts et les corps des vivants,
dans la course se laissant aller au désespoir
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Rodica Draghincescu
EX(o)ilium

Qu’est-ce que j’ai pris
Dans ma valise au départ ?
Des cicatrices, des astuces,
Misère sociale, démons affectifs,
Des vices et des contes de fée


Langue du départ
Avec des maux de l’autre côté du mot :
Amuïs, meurtris, maudits,
Mots itinéraires.


Qu’est-ce que j’ai gardé
Dans ma valise à l’arrivée ?
Les batiks colorés de ma mère,
Le dor * des lieux miteux,
Un proverbe éphémère
La fièvre des maladies essayées,
Les gâteaux en terre, saupoudrés de glaise,
Les premiers jouets en bois et en laine,
Les pluies rares, les vents et les gels de la pousta,*
Les bécasses et les cigognes couvant des toits rebelles.
Les tambours et les feux dans les rues, à Noël


Langue de l’arrivée
Avec des mots miroirs :
Avoir ou être, naître ou mourir,
Être ou avoir, mourir ou naître,
Pas de temps à gagner,
Pas de temps à perdre.


La langue n’est plus
Dans ce cas-ci l’organe du cœur
Mais celui du savoir
Et celui du pouvoir.


Où es-tu lieu de naissance
Quand tu deviens in- tranquillité
Endroit sur une carte postale
Sans droit à l’avenir, jamais postée,
Trace emmagasinée dans le fond des pupilles,
Trace éloignée dans l’espace de l’écrit


Sans patrie, rabougrie, cachée, isolée,
Seule avec le monde, triée et tirée au sort,
Trace irréelle dans sa propre réalité,
Trace immonde dans sa propre propreté,
En état d’infériorité ou de supériorité,
D’opacité ou de transparence héroïque


Langue du départ
Avec des maux de l’autre côté du mot :
Amuïs, meurtris, maudits,
Mots itinéraires, mots de terre.


Où suis-je moi entre tous ces pays
Toujours à la fenêtre, à la frontière,
Toujours en marge et en marche,
Toujours grave,
Trop grande ou trop petite,
Pédante ou perdante,
Telle une mouche cognitive


Langue de l’arrivée
Avec des mots miroirs :
Avoir ou être, naître ou mourir,
Être ou avoir, mourir ou naître,
Pas de temps à gagner,
Pas de temps à perdre.


Où es-tu lieu de naissance,
Quand tu deviens seulement voyance
Dessin, ligne à plaire et à émouvoir
Endroit creux dans la main effrayée,
Paysage de passage, débris d’image
Vides ou pleins de boue burlesque
Au-dessus desquels le peintre a collé
Ses fresques de jeune artiste :


Dessins, lignes à plaire et à émouvoir,
Un dé, un dada, une nounou et des
Rendez-vous manqués.


Langue du départ
Avec des maux de l’autre côté du mot :
Amuïs, meurtris, maudits,
Mots de terre, itinéraires.


Où es-tu lieu mis à nu
Avec ton dieu athée noceur
Déraciné et de mauvaise humeur,
Qui dansait la ronde du néant
Ses ailes trop humaines, trop décalées,
Esquissant des indulgences d’un nuage à l’autre
Avoir ou être, naître ou mourir,
Être ou avoir, mourir ou naître,


Où êtes-vous mes jeux d’oublis et de glissements de sens
J'entendais frapper aux portes de mon enfance
Avec vos borgnes bolcheviks tricolores ?
Vos silences et vos larmes de culpabilité
Votre mélancolie rouge, en rupture de syllabes,
Dont on avait peur d’un souvenir à l’autre.


Votre amabilité d’apôtres du néam*,
Votre insomnie à vie, acide


Où est-ce que vous êtes tous ceux que
J’entendais frapper aux portes de mon enfance ?
Comme une ode, comme un hymne,
Comme une chanson à boire :


Avoir ou être, naître ou mourir,
Être ou avoir, mourir ou naître,
……………………………………
Amnéville, le 8/15 septembre 2009
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Ils écrivaient des vers ? Ils en vidaient, des verres ! C'était l'Akhmatova des Roumains ? Exactement ! Et sans le masque – tu parles ! – de la femme savante.
Et moi, Zorika, j'ai pas fait d'études de lettres moi ? Qu'est-ce que ça peut leur faire que j'ai choisi comme langue le russe ? Il m'ignorent. Ils ont tort. Un jour viendra le temps des Russes ! Je serai quelqu'un alors. Qu'ils ne viennent pas, les amis de Vic, me parler de la poésie de Montale, d'Éluard, de monsieur Gottfried Benn, de Sapho et de l'aristocratique T.S. Eliot, de la pensée de Vattimo et autres. Du vent ! Des baudruches colorées.
(p. 18)
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On ne s’en sort pas, les amis, si vous vociférez tous en même temps si fort et si centrés sur vous-mêmes ! De mes voyages à travers les pays, j’ai retenu qu’il fallait dormir pour approcher l’horizon, qu’il fallait disparaître en soi, comme un vin léger dans un corps fatigué.

Allez, on est vendredi et demain sera autre chose. Tout dépend de comment vous ouvrez les yeux. Attention, il y a des yeux d’appareillage, d’autres de commencement, d’autres de début manqué, d’autres de démission imminente, d’autres d’exode, d’autres d’exil, bref, de contour mauve, s’il y a des poètes parmi vous, d’humilité, pour les travailleurs au noir et les illégaux, d’anti-mémoire pour ceux qui n’ont rien à foutre, à perdre ou à gagner et qui veulent juste faire les troubadours d’une langue à l’autre. Tels les serpents qui se bouffent tout seuls en commençant par la queue.

Bonne nuit, culcați-vă, je vous conduirai au bout du tunnel, je m’appelle Charon, vous l’ai-je précisé ? Par manque de finance, à la place des stewardesses, j’ai deux bulldogs si humains d’apparence, ne vous inquiétez pas, je les ai bien nourris d’avance !

Bon sommeil, l’Occident sera pour demain… »

(pp. 38-39)
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Rodica Draghincescu
BLÉ BLANC
(L’ARTDURIEN) 1

je ne vois rien quand je
ne vois rien je ne vois rien c’est le
rien qui me voit quand je
ne vois rien je vois comment le
rien me voit je
suis « rienne » depuis
mon absence je m’absente je ne ressens pas
je suis plus que l’inexistence
j’obéis au rien blanc et froid je suis un
rien de neige je neige des petits riens de la mémoire
sur les grands riens de l’oubli j’apprends l’oubli
de l’où est-il ? de l’où est-elle ?
je n’oublie pas où je neige
je suis le blé blanc du regard
dans lequel il y a quelque chose là où il n’y a rien
tout me suit partout nous nous suivons l’un l’autre
on est des riens de deux genres : M et F
(je neige de la direction F et lui de la direction M)
nous nous neigeons nous neigeons
ensemble autour du rien neigeant
je n’ai rien à déclarer pas de corps pas de sang
pas de nom je me nomme sans m’appeler
je m’appelle « rienne » ou « rien-rien »
autrement pas de nom pas de « pas » et pas de pas
je ne viens pas je ne retourne pas je ne fais rien
je fabrique des riens sans mérite
je n’ai pas de nom ni de têtes pour des noms
pas de tête pour la nommer tête
rien à déclarer sauf ma tête absente
(dans ma tête absente il y a
de la neige ou du blé blanc
et dans la neige des mots neigés
âgés de tout ce qu’ils ne peuvent pas faire
mais courageux de ne rien dire et fiers de leur blé blanc)
enfin rien rien à déclarer
excusez-moi.
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Je dévore ce que j’aime. Dès que j’aime quelqu’un ou quelque chose, j’ouvre la bouche. L’hypnose réussit et la proie y entre. (Le perroquet s’est laissé baiser sur les ailes… Hélas, ses griffes ne l’ont pas défendu).
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