Avant mes trente ans, je passais mon temps à déménager d'un bout à l'autre de ma ville. Je vivais tantôt chez moi, tantôt ailleurs, hébergée de-ci de-là, chez mes amis de toujours ou chez de simples copains. Bien entendu, on était loin d'un vagabondage existentiel qui laisse son empreinte pesante à chaque pas. Bien au contraire. On était dans la légèreté. À vingt ans, on a presque tout, et on n'a presque rien. Il n'y a rien que l'on ne pourrait lâcher, et rien à quoi vraiment se raccrocher. On peut tout désirer, et ne rien désirer. On peut rester, ou partir à tout moment. Ce que l'on érige on en clin d'œil, on peut le détruire en un claquement de doigts. Une sieste suffit pour dégriser, une nuit suffit pour guérir. Voilà pourquoi nous pensons frôler la liberté. La toucher du doigt. Mais j'ai toujours su que c'était tout autre chose : un simulacre de liberté dissimulant un danger qui ne dit pas son nom.
Préface, Sabrina Huang
J’avais tout faux . Plus les choses sont visibles et tangibles et plus elles disparaissent facilement …Est ce que je peux revenir en arrière légèrement en arrière ? Ne serait ce que pour quelques secondes…Est ce que je peux laisser dans la vie ou dans les souvenirs des gens une trace de mon passage ?
Aussi répétitive et lassante soit-elle, une expérience nous fait grandir, à chaque fois. Moi, je pense que dans la vie nous allons sans cesse d'une boîte à une autre. Nos affaires voyagent de carton en carton. Nous alternons entre le bureau et l'appartement, nous allons d'ascenseur en ascenseur. En route vers diverses destinations, nous cheminons de wagon en wagon, suivant notre propre trajectoire. Mais une fois au bout de la course, nous nous retrouvons allongés dans un cercueil, prêt à disparaitre. Ainsi, jusqu'au jour où notre squelette disparaît sans laisser de traces, il nous est impossible de nous extirper de ce cortège de boîte.
Enfant, j'avais toujours hâte que papa m'emmène au salon de coiffure.
Je n'ai jamais eu deux fois la même coupe, mais je me sentais à chaque fois aussi léger et heureux en sortant.
C'était comme si je devenais quelqu'un d'autre et que le monde changeait avec moi...
Tatouer, c'est faire poindre la beauté dans la douleur.