Collectif

"Il me fatigue ce brouillard qui attenu les teintes, fait disparaitre les couleurs...
- Tu sais... J'ose plus mettre mon manteau bleu
- Je comprends, mon amour, c'est normal... C'est juste qu'avec ce foutu brouillard plus rien est noir. Ombre ou pénombre, comme si la vie s'effaçait... Comme si la page redevenait blanche... jour après jour. Jusqu'à ce que la page disparaisse elle-même.
- Rentrons au chaud, il y a un petit café pas loin.
- Ça fait du bien de se poser ici. T'as vu, il y a des bandes dessinées à dispo.
- Oui, c'est cool, regarde le gars en face, il est drôle.
Il est tout concentré sur sa BD comme un gamin coupé du monde. Et, regarde, il a presque la même tête que l'autoportrait de Franquin sur la couverture. En plus apaisé. Ca donne envie de relire "Idées noires". En même temps, je suis pas sûr d'être capable de me plonger en ce moment dans un bouquin aussi désespéré.
- Oui, mais c'est tellement drôle. Rappelle-toi le général foudroyé par la foudre sur son cheval.
- Et le siège éjectable pour hélicoptère, hi hi ! Regarde comme il est absorbé...
- Ha ha ha, il est génial, à ce bidonne comme un salle gosse.
- Avec son pantalon de jogging comme s'il sortait de l'école avec ses affaires de sport.
- C'était beau.
- Franquin était tellement déprimé pourtant quand il a dessiné "Idées noires".
- Comme quoi on peut toujours dessiner des choses belles et drôles, même dans le brouillard, mon ange...
... Je crois que j'ai enfin trouvé mon lecteur idéal, j'aurais jamais pensé qu'il porterait un jogging."