Citations de Aglaja Kempf (12)
Alliances poétiques par Aglaja Kempf
(...) Texte et illustrations, qui permettent à l'artiste d'exprimer sa franchise débridée, renvoient directement aux topoï du merveilleux. Avec un lyrisme exalté, la prose libre, difficile au suivre, repose essentiellement sur des impressions poétiques et oniriques, qui donnent à l'ensemble une aura fabuleuse. L'amour y figure en tant qu'expression du mouvement de l'âme le plus intime.Et c'est dans cette traduction du subconscient que réside pour l'artiste l'acception même de l'expressionnisme.
Cette préoccupation rejoint indubitablement celles du viennois Sigmund Freud qui publie en 1900 son
" Interprétation des rêves "
Alliances poétiques d'Aglaja Kempf
(...) Les influences de l'art populaire affleurent partout, et pourtant peu d'oeuvres seront autant associées à Kokoschka que celle-ci, emblématique de son nom.Figures et animaux se déploient en couleurs franches, apposées de façon autonome et rigoureusement soumises à une esthétique du cloisonné. L'enchantement naît de la force graphique, mais aussi de la puissance de cette ode au sentiment amoureux, profondément ancré dans la vie.
(***" Les garçons qui rêvent "d'O.Kokoschka, éditions Pagine d'Arte, 2022 )
(...)
Les événements de l'enfance ne me touchent pas
non plus ceux de l'âge mûr
mais bien ceux de la jeunesse
un désir hésitant
une honte infondée devant les grands
et les compagnons de jeunesse
dans l'immersion et la solitude
je me reconnaissais et reconnaissais mon corps
et je tombais et rêvais l'amour (...)
(...)
Je suis le seul
à savoir de toi
ce qu'on attend du printemps
mais ne parlons pas des choses cachées
quand la chair elle-même ne sait pas encore
que nous allons devoir chercher
comme un enfant perdu
quelque chose d'indicible
comme suspendu dans l'air (...)
(...)
Je vous dévore
hommes
femmes
enfants somnolents aux aguets
moi le fougueux
tendre loup-garou en vous
et je tombais et rêvais d'incessantes
métamorphoses (...)
Je vous dévore
hommes
femmes
enfants somnolents aux aguets
moi le fougueux
Tendre loup-garou en vous
et je tombais et rêvais d'incessantes
métamorphoses
(...)
Alliances poétiques par Aglaja Kempf
(...)L'opuscule s'insère dans le renouveau de l'art du livre initié au début du XXe siècle. Les détails sont soignés. Format des illustrations, typographie audacieuse, choix du papier , reliure, tout concourt à répondre à répondre à l'idéal d'oeuvre d'art totale promu par les artistes de la Vienne 1900, ambitionnant une réunion entre les beaux-arts et les arts appliqués .(...)
Les courbes inquiétantes du rêve de Véronique Mauron
(...) Étudiant dans la Vienne de Freud, de Klimt et de Schnitzler, Kokoschka interprète à sa manière le refus de la rationalité au profit de l'imagination et de l'onirisme. Un écho à Hofmannsthal "" Des mondes s'ouvrent devant moi, si profonds/ Que je m'y glisse, ébloui, hésitant ".
Écrire de la poésie, c'est apprendre à se connaître et à connaître son désir le plus intime et le plus pur, pour commencer à le former.
Oskar Kokoschka
Les garçons qui rêvent
extrait 3
la mer attrape ses cheveux de fer et danse avec elle
dans la tornade, où
des colonnes d’eau traversent la mer rugissante
comme des serpents invisibles
j’entends les appels des marins
qui veulent rejoindre le pays des oiseaux parleurs
les voiles se balancent de-ci de-là
un air froid les agite et secoue leurs toiles
le bateau accoste
par traits audibles
et se distinguent en cadence les processions
de ceux qui en descendent
discrètement des rôdeurs vêtus de laine brune se faufilent
et de maigres filles nues offrent aux oiseaux
des noix et des colliers de corail en souvenir
des nuits des tendresses obscures
et je tombais et rêvais la nuit malade
pourquoi dormez-vous
hommes en bleu
sous les branches des sombres noyers
au clair de lune ?
et, vous, douces femmes
qu’est-ce qui croît dans vos manteaux rouges
est-ce l’attente dans vos entrailles de membres enlacés
depuis hier, depuis toujours ?
…
/ Traduit de l’allemand par Lucilla Taddei et Samir Hobeica
Les garçons qui rêvent
extrait 2
sans qu’une traînée claire
s’évanouissant dans l’air sombre n’attire
les animaux muets sous les tombantes fleurs étoilées
des furies de sang
par quatre et cinq s’échappent
des vertes et haletantes forêts marines
où il pleut
silencieusement
des vagues déferlent au-delà des forêts lointaines
et traversent d’innombrables rameaux d’air
aux fleurs rouges
sans racines
qui plongent comme des cheveux dans l’eau de mer
là-bas s’écoulent les verts flots
et la terrible mer abyssale
des poissons carnivores
s’empare de la barque surchargée
dont les mâts balancent des cages de petits
oiseaux bleus
…
/ Traduit de l’allemand par Lucilla Taddei et Samir Hobeica
Les garçons qui rêvent
extrait 1
petit poisson rouge
rouge petit poisson
je te pique à mort avec le couteau à trois lames
te déchire en deux avec mes doigts
pour mettre fin à ton tournoiement silencieux
petit poisson rouge
rouge petit poisson
mon petit couteau est rouge
mes petits doigts sont rouges
dans un bol baigne un petit poisson mort
et je tombais et rêvais
le destin est plein de poches
j’attends auprès d’un arbre de pierre péruvien
ses branches à rameaux feuillus accrochent
comme des bras minces et des doigts frêles
des figures jaunes
qui remuent imperceptiblement dans les buissons
de fleurs étoilées
…
/ Traduit de l’allemand par Lucilla Taddei et Samir Hobeica