Aimée Bianca

Le décès de Kenneth m'a figée dans une existence qui n'en était pas une, à laquelle je me suis raccrochée aveuglément. Il n'est plus de ce monde et cette liste ne m'a pas aidée à faire mon deuil. Il me manque. Hier. Aujourd hui. Demain. Tout le temps.

Je sais que mon frère n’est pas à proprement parler ici. Son corps ou ce qu’il en reste après ces nombreuses années oui, mais son âme est ailleurs. Avec moi, toujours.

Dis quelque chose, m'implore-t-il presque.
J'ai mal au cœur, laissé-je échapper.
Il déglutit.
Littéralement, précisé-je. J'ai mal de ne pas savoir ce que tu as traversé, et en même temps, de le deviner.

Difficile de comprendre ce que c’est de perdre un jumeau. C’est une moitié de soi.

Profitez de la vie.
Cette fois, c'est Zoey que je regarde.
- Moi, je compte en savourer chaque seconde.
[…] Je me retourne vers les convives, puis vers le ciel au-dessus de ma tête qui se colore de rose et orange. Le soleil se couche.
- À toi, Kenny!
- À Kenneth, répètent quelques personnes.
Je bois dans mon verre.
- À toi, Johnny, concluent-ils en applaudissant.

- Tu vas faire quoi, maintenant? La première décision que tu vas prendre pour toi, ça sera laquelle? […]
- Je ne sais pas, et toi?
J'ai l'impression qu'il continue à s'approcher de moi.
- Je suis là.
Il m'embrasse en scellant nos bouches dans un baiser libérateur. J'ai la sensation de tomber.

Au lycée, il était le mec que tout le monde redoutait, mais en même temps, idolâtrait. Derrière chaque homme important se cache quelqu’un. Dans le dos de Johnny, il y avait Kenneth.

Ça fait du bien, pour une fois, d’être entourée sans avoir envie de fuir.

Je sais qu’il se souvient. C’était il y a quatre ans. Il m’avait brisé le cœur. Aujourd’hui il me le reconstruit.

Tu avais l'air d'avoir besoin d'aide pour vérifier si j'étais bien réel

Je n'ai pas le temps de terminer que sa bouche chaude est contre la mienne, telle une réponse à mon appel silencieux. Le sol se dérobe sous mes pieds. je suis emportée dans un tourbillon dévasteur et j'oublie tout.

Je suis froide, je veux lui montrer tout le contraire de ce que j'éprouve au fond pour qu'il ne se sente pas à sa place, ni accueuilli, ni même attendu. Je veux qu'il s'en aille et qu'il me laisse gérer ce que sa présence éveille en moi, sans qu'il m'analyse d'un oeil curieux. Je veux qu'il arrête de jouer, de me chercher.

- Je suis certain que d'où il est, il est heureux pour toi, pour vous.

J'avais préparé un long discours, mais à genoux devant elle, j'oublie tout. Sauf une chose: c'est avec elle que j'ai envie de passer le restant de ma vie.
- Veux-tu devenir madame Perkins ?
- Mille fois oui!

— C’est délicieux, June.
Gneu gneu gneu !
Quel lèche-cul.

Aucune sensation n'est comparable à celle que je ressens quand je fais glisser les lames sur la surface gelée et que mes poumons s'emplissent de l'air frais de la patinoire.

-Tu pense que Kenny aurais dit quoi ? Demandé-je à mon père
-Pour vous deux ?
J’acquiesce
-Il n’aurais pas été content au début, déclare-t-il.
Mon abdomen se tord. Nous connaissions Kenneth et savoir que mon père pense comme moi me fait mal. J’aurais aimé qu’il me dise le contraire.
-Par peur que tu la blesse et que tu la fasse souffrir, poursuit-il. Mais il aurais vite changer d’avis quand il aurais compris que tu étais prêt à te poser dans une relation avec une fille.
-CETTE fille, précisé-je. Ça n’a toujours été qu’elle.
-Il l’aurais vu. Il aurait compris que vous vous aimez et il l’aurait accepté.
Il cherche mon regard et je lui rends. Le sien est aussi encourageant qu’affectueux.
-Je suis certain que d’où il est, il est heureux pour toi, pour vous.

-Je n’ai pas tenu ma promesse, Kenny. Je n’y arrive plus…
Depuis qu’elle est revenue dans ma vie, je suis incapable de m’éloigner d’elle.
J’ai crue, qu’en coupant tous les contacts, que cela suffirait. J’ai eu tort.
-Je suis tellement désolée de te l’avoir caché. J’aurais du te le dire dès le départ…
Depuis cette rencontre dans la cour de récré.
Depuis qu’il me l’a présenté et que je lui ai rétorqué, moqueur: « Clark ? Comme Clark Kent dans Smallville ? »
Depuis qu’elle m’a transpercé de ce regard furieux et envoûtant que je vois encore quand je ferme les yeux.
Depuis que nous avons 6 ans.
-Je suis tellement amoureux de Zoey, Kenny.

Dès le premier jour ou je t’ai vue dans cet ensemble bleu marine, dans les locaux de Patience, j’ai su que toutes les règles que je m’imposais allaient être mises à rudes épreuves.

La symbolique ne pouvait pas être plus forte et elle me frappe en pleine poitrine.
Je sais déjà ce que je vais inscrire en premier. Ce que je vais faire dès maintenant: l’aimer jusqu’à ne plus respirer.