AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Glaneurdelivres


Le vent menait un assez joli vacarme dans le bois et venait siffler sur le toit de la « datcha ». Et nous ne vous cacherons pas que c’était une de ces soirées où l’angoisse n’est pas loin du cœur.
Avidement, mon étrange compagne me posait des questions :
-Lave-t-on toujours le linge, à Paris ?
-Quelle idée ! faisais-je.
-Alors, il y a encore des voitures qui circulent et on peut les prendre pour sortir ?
-Mais…
-Il y a encore des magasins ?
-Madame, disais-je, vous avez faim, je le vois ; mangez.
-L’habitude en est prise. Nous n’avons plus faim, maintenant.
Elle continuait :
-Alors, on peut rendre visite à ses amis ? recevoir des lettres ? tenir les propos que l’on veut ?
Et, le cœur alors éclatant :
-On peut dormir en paix dans son lit, sans être réveillé par d’affreuses mains qui vous secouent et qui viennent perquisitionner ! per-qui-si-tion-ner !
Elle voulut prévenir ses larmes et changea de ton. Passant rêveusement ses doigts sur ses cheveux lisses, gracieuse, elle demanda :
-Alors, on peut encore se faire coiffer, à Paris ?
L’invraisemblable tête-à-tête dura jusqu’à trois heures du matin. Quand la conversation tombait, outre ce fameux vent, on entendait des colonies de rats qui menaient une folle sarabande dans l’étage. Elle ne me dit ni son nom ni son crime. Quand je lui parlais de la Russie de Lénine, elle ne répondait pas et me faisait comprendre que, même lorsqu’il n’y a que des ombres, il faut prendre garde à ce que l’on dit dans cette Russie où j’arrivais (..)
Sur une chaise longue pouilleuse, au milieu du steeple-chase des rats, s’acheva ma première et mystérieuse nuit de Russie. Je l’avais vécue dans l’antichambre de la prison.
Commenter  J’apprécie          150





Ont apprécié cette citation (15)voir plus




{* *}