Arrivé de l’autre côté du pont, je découvris une petite ville très excitée par une Kermess3 qui devait s’y dérouler deux jours plus tard. Tous les habitants avaient envahi les rues ou attendaient devant les seuils de leurs maisons, et les charpentiers peinaient à la tâche, tapant avec enthousiasme sur les planches et les parois qui formeraient les étals et les échoppes tout le long de la rue principale, au milieu de laquelle, dans une rigole de pierre, un ruisselet d’eau étincelante descendait en chuintant. Des enseignes en fer forgé se balançaient devant les portes et, à en juger par les rangées de montres ternies qui pendaient devant les fenêtres des petits salons défraîchis, presque une maison sur deux devait abriter un horloger. Je m’arrêtai devant une fontaine – la traditionnelle fontaine suisse qui crache une eau pure par quatre tuyaux ornementaux et que surmonte le traditionnel chevalier en vieille pierre grise, armé comme pour la parade.
Je me levai – sans enthousiasme. Comme si je voulais gagner du temps avant de partir, je m’approchai de l’autel pour lire une inscription que je venais de découvrir. C’était une toute petite plaque métallique qui portait un texte en allemand. Je le traduis :
EN SOUVENIR ÉTERNEL
DU
RÉVÉREND PÈRE CHESSEZ
pendant vingt ans, pasteur bien aimé de cette paroisse
mort le 16 avril 1825, âgé de 44 ans
IL VÉCUT EN SAINT ; IL MOURUT EN MARTYR
L'hiver s'attarda longtemps, mais le printemps arriva enfin dans un éclat de soleil. Les brumes grises furent arrachées comme par magie. Les couleurs froides disparurent du paysage. La terre devient fraîcheur; l'air chaleur; le ciel lumière. [...] Jamais plus, durant toutes les années qui se sont écoulées depuis, je n'ai vu de transition aussi étonnante.
Est-ce qu'une telle fidélité peut vraiment survivre par-delà la tombe ?
Ce garde, si tu le lui demandais, te dirait qu'il est libre. Il me plaint peut-être d'être prisonnier. Pourtant il est encore moins libre que moi. Il est esclave de la discipline. (p.73)
C'était un sombre après-midi - un de ces après-midi lugubres qui semblent pour le moins cruels de venir au milieu du printemps. (p.87)
C'était quelque chose d'autre que l'amour: c'était de l'adoration. Etre avec lui était une satisfaction sans bornes - être éloignée de lui ressemblait au désespoir. (p. 86)
Un homme mauvais a peur de son ombre, dit gravement Monsieur Maurice. Hartmann n'a vu que le reflet de son crime dans le miroir de sa conscience. (p.126)