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Citation de dourvach


[AVANT-PROPOS]

« Il y a des noms et des phrases qui vous reviennent comme des refrains dans les chansons ».

"Les rues dans l'Aurore" [1945] et "L'Homme de la scierie" [1950] sont les deux romans phares de la manière du « premier » Dhôtel, que l'on pourrait dire noire — dans cette veine on citera "David" [1948], "Le Plateau de Mazagran" [1947], "Les Chemins du Long voyage" [1949], "Bernard le Paresseux" [1952] , par exemple. L'un de ces deux romans, pour ainsi dire devenus mythiques, "L'Homme de la scierie" est aujourd'hui, enfin réédité par les jeunes éditions Sous le Sceau du Tabellion.

Georges Leban, le héros des "rues dans l'Aurore", est un menteur à la manœuvre dans une bourgade de moyenne importance flanquée d'un faubourg qui ne cesse de s'agrandir et où, dans l'arrière-salle de bistrots et d'épiceries dignes des fonds de province et des derniers cercles de l'enfer, se fomentent des intrigues torses qu'éclairent les mensonges de Leban et la chevelure blonde à mèche blanche d'une fille qui serre le cœur à force d'être morte et d'apparaître vivante.

Construit sur un flash-back époustouflant — une première en 1950 dans le roman français — "L'Homme de la scierie" brouille les temps et les lieux : il débute dans une scierie des bords de Seine avant d'émigrer en Normandie dans le château d'Asqueville, face à la mer. On dira que se croisent l'histoire des Joras et des Chalfour.

Les frères Chalfour sont des gens de peu. L'aîné, Henri, à la force herculéenne, s'abrutit à trimballer des planches dur un chantier, admiré par les seuls oiseaux de proie qui tournant dans le ciel au-dessus de la scierie. Le cadet, Rémi, un paresseux, trafique dans l'espoir de monter un élevage de chevaux.

Les Joras : de grands propriétaires. Hector fume sans broncher d'énormes cigares « qui le font atrocement pâlir », Alcide est un casse-cou qui sort en mer par gros temps. Et puis il y a la sœur, Eléonore, « la fille Joras », sauvage et chaude, dont on se demande par quelle lubie elle a épousé Damont, qui se promène dans les champs en faisant des moulinets avec une canne à pommeau d'or, tout en se vantant : « La mer ne peut noyer un fat tel que moi ». Et que dire de la comtesse de Falebert, qui a des visions ?

Le fin mot ? Il faut le demander au marchand de chevaux. Mais il est au fond du fleuve et le lecteur dans tous ses états.

De même que "Le Village pathétique" [1943] est articulé sur le chant de la grive — trois brèves, deux longues — "L"Homme de la scierie" s'appuie, lui, pour reprendre haleine, sur deux refrains lancinants : « Qui le savait ? » et « Le marchand de chevaux est au fond du fleuve ».

Patrick REUMAUX

[André DHÔTEL, "L'Homme de la scierie", éditions Gallimard (Paris), 1950 — rééd. aux éditions Sous le Sceau du Tabellion (Caluire et Cuire), 2020, 432 pages]
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