Qui êtes-vous ? implore-t-elle. Qui êtes-vous ? Parle ! Donne-moi ton visage à engloutir, tes mots à mordre... Oui, prends mon front entre tes mains, appuie sur mes tempes, mets tes lèvres sur ma bouche, nourris-moi sans cesse de tes phrases, à en mourir... Que veux-tu ? L'oubli est la lumière fauve du soleil carnassier ? Mais que fais-tu des pleurs du soleil ? Qui êtes-vous ?... Tu n'as plus sur toi le parfum de la résine, pourquoi ?
Je ne vous connais pas. Partez !
(...)
- Peux-tu m'aider à vivre dans l'oubli ? murmure-t-elle.
- Anne, tu es un corps sans mémoire ! Et moi, pour me souvenir, j'ai besoin de la terre de ton ventre.
Cette maison où je suis née et qui va basculer un jour ou l'autre dans le vide, c'est ma seule façon de tenir en équilibre.
Ce simple geste qui dérape dans le vide semble suffire,à rétablir l'équilibre et l'inconnue apprivoisant l'espace qui fuyait devant elle, sort du café et disparait.
Quels mots, quels rythmes de la phrase peuvent suggérer, rendre palpable ce rouge surgi de la sauvagerie des deux corps mutilés de ses parents.
Je suis seule sans pouvoir habiter ma solitude.