AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de sonatem


     
C’est cette irréalité qui nous fait riches de ce que nous ne sommes pas. C’est cette irréalité qui nous offre la liberté de l’espace intermédiaire qui s’y découvre, accessible à tous mais où chacun est alors à même de trouver le passage par lequel il peut se réapproprier le monde. (…)
Aby Warburg, part en quête de ces passages qu’il voit apparaître dans le vertige des formes. Sa vie durant, quitte à le payer de son équilibre, il en cherche le secret qu’il découvre dans l’extraordinaire courage de l’imagination affrontant, à travers les siècles et les civilisations, la peur qui assiège chacun au cœur de sa pensée, la peur de voir surgir la forme qui ouvre sur le néant qui nous habite.
Et peut-être avant tous, Dante en est si conscient que, dès les premiers vers de La Divine Comédie, il dit le danger de la forêt obscure « qui ranime la peur dans la pensée ». Cette « peur dans la pensée », c’est elle qui empêche de regarder ailleurs, c’est elle qui empêche cette continuelle métamorphose pour rencontrer nos rêves et dont, pour Aby Warburg, certaines images sont capables de conserver et transmettre, d’une époque à l’autre, l’énergie émotive. Cette « peur dans la pensée », c’est encore tout ce contre quoi Victor Hugo combat, en s’exclamant dans Le Promontoire du songe : « Allez au-delà, extravaguez ! »
     
Aussi comment ne pas voir que la marchandisation du monde mise absolument sur cette « peur dans la pensée », produisant des millions de faux-semblants comme autant de leurres qui cadenassent l’horizon ? Comment ne pas voir que cette « peur dans la pensée » est à l’origine de toutes les démissions ?
     
Sinon aurait-on oublié la beauté que Victor Hugo évoque comme « l’infini contenu dans un contour » et qui pourrait bien se confondre avec le but de la « lente flèche de la beauté », que Nietzsche se plaît à imaginer comme celle « qu’on emporte avec soi presque à son insu et qu’un jour, en rêve, on redécouvre, mais qui enfin, après nous avoir longtemps tenus modestement au cœur, prend de nous possession complète, remplit nos yeux de larmes, notre cœur de désir ». (Humain, trop humain, 1878)
     
(pp. 164-167)
Commenter  J’apprécie          80





Ont apprécié cette citation (3)voir plus




{* *}