Citations de Antoine de Rivarol (111)
Si on veut savoir quel est ce courtisan chargé des faveurs du roi et des rubans de la vanité, j'avouerai qu'il est plus aisé de le décorer que de le peindre: il a tous les airs de son père, excepté celui de grand seigneur; toutes ses superstitions, excepté sa piété; toutes ses assiduités autour du maître, excepté son attachement.
Rivarol, Journal politique national
Antoine de RIVAROL / Esprit de Rivarol [oeuvres diverses] / Paris 1808 [BnF cote Z-24383]
« C’est un terrible avantage que de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser. »
< Anecdotes et bons mots p.163 >
[...] car s'il est vrai que nous ne fassions la charité que parce qu'elle nous doit être payée à usure, et que Jésus-Christ nous tienne compte d'un verre d'eau donné en son nom, il faut avouer que notre charité, loin d'être une vertu, n'est qu'une industrie, et qu'un vrai chrétien n'est qu'un marchand qui place à gros intérêt. On dira que les effets sont les mêmes, et que l'humanité est toujours secourue. Oui, sans doute; mais si la main est bienfaisante, le cœur n'est qu'avide; l'action est bonne, mais la route est vicieuse. Ah! si au lieu de commencer par le dogme avec les enfants, on commençait par la morale!
Rivarol, Lettre à M.Necker.
GAALON (M.), de Caën, poète qui vient de faire la plus vive sensation dans toute la Normandie par un impromptu. Il est si élégant, si neuf et si ingénieux, que les amis même de l'auteur ont peine à croire qu'il ne soit pas le fruit d'une profonde méditation. Nous allons le citer :
Comme Cypris,
Vous avez le talent de plaire,
Comme Cypris,
Vous enchaînez les jeux, les ris,
À Gnide, à Paphos, à Cythère,
Vous savez triompher, Glycère,
Comme Cypris.
Rivarol, Le petit almanach de nos grands hommes
BÉRARDIER DE BATTANT (M. l'abbé) a traduit Lucrèce en vers français; il est parvenu, selon son louable but, à éteindre ce poète, le plus dangereux de l'Antiquité; et c'est ainsi qu'il faut traduire tous ces athées.
Rivarol, Le petit almanach de nos grands hommes
J'ai aimé la gloire, je l'avoue: mais c'était dans un âge où l'expérience ne m'avait point appris la vraie valeur des choses, où je croyais qu'elle pouvait exister pur et accompagnée de quelque repos, où je pensais qu'elle était une source de jouissances chères au cœur et non une lutte éternelle de vanité; quand je croyais que, sans être un moyen de fortune, elle n'était du moins pas un titre d'exclusion à cet égard. Le temps et la réflexion m'ont éclairé. Je ne suis pas de ceux qui peuvent se proposer de la poussière et du bruit pour objet et pour fruit de leur travaux.
Lettre du 4 mars 1784 de Chamfort à l'abbé Roman
Jean Dutourd a dit très justement [à propos de Rivarol] que le fondement de son ostracisme, son terrible tort est « d'avoir démystifié la révolution ». Il la regarde comme un événement historique avec ses crimes et ses stupidités, œuvre d'hommes de chair et de sang. Tandis que les Français, de l'époque jusqu'à aujourd'hui, voient là un événement sacré, descendu des nuées. Dutourd écrit: « Tout le monde le honnit parce qu'il détruit les contes de fée nationaux. [...] Je ne connais que la vérité pour rester scandaleuse aussi longtemps. » Au fond, il a été détesté parce qu'il a ridiculisé un événement et un concept sacré: la révolution.
Ce qui maintient le peu d’honnêteté et de morale publique qui brille en ce monde, c'est qu'un coquin ne veut point passer pour tel, et qu'il appelle ainsi un autre coquin comme lui. Tout serait perdu s'il osait dire tout haut : je suis un coquin. cette pudeur n'est point hypocrisie.
Les empires les plus civilisés seront toujours aussi près de la barbarie, que le fer le plus poli l'est de la rouille ; les nations, comme les métaux, n'ont de brillant que les surfaces.
De la philosophie moderne
Tout le monde le honnit parce qu'il détruit les contes de fée nationaux.
Malheur à qui remue le fond d'une Nation!
On passe la moitié de sa vie a' retenir sans comprendre , et l'autre moitié a' comprendre sans retenir.
Rien n'étonne quand tout étonne ;C'est l'état des enfants .
Sans l'âme, le corps n'aurait pas de sentiment ; et sans le corps, l'âme n'aurait pas de sensations.
Le temps est comme un fleuve , il ne remonte pas vers sa source .
L'amitié est la sœur de l'amour , mais pas du même lit .
J'ai quitté l'Angleterre pour deux raisons : c'est que d'abord le climat ne me convient pas, et qu'ensuite j'ai besoin d'être sur le continent pour mon dictionnaire de la langue. D'ailleurs, je n'aime pas un pays où il y a plus d'apothicaires que de boulangers, et où l'on ne trouve de fruits mûrs que les pommes cuites. Les Anglaises sont belles, mais ont deux bras gauches.
Ce qu'il faut éviter en morale, c'est de placer sa vertu dans des actes indifférents, comme de garder sa virginité.
Le chat ne nous caresse pas ; il se caresse à nous.
Il y a des vertus qu'on ne peut exercer que quand on est riche.