OUVERTURE
Ouverte, la trappe
La petite danseuse sort sa tête
Avant,
l'ombre seule était son foyer
Un pied se risquait, tendu fort,
Une blancheur
Puis, revenu dans le noir, n'était plus
Avant, le passé était dans le passé
Elle étire un bras, l'autre, elle l'étire aussi
Et le premier encore
En se touchant la nuque
Il y a une boucle dans un carré
Le magicien n'agira plus
Elle se hisse, elle a le temps,
Devant son visage toutes les jambes
Qui passent sont les jambes des danseuses
Elle veut le faire
Traverser autant qu'elles l'obscurité
Si on les renversait, leurs pointes ne seraient
Qu'appels qui cherchent l'air, mais redressées
Un peu de lumière coule le long d'elles
Les pieds se tendent et les bras se balancent
Et trois se déplacent en tournant, calmes
Chacune rose des vents
La petite danseuse sort, couverte de craie
Se hissant
Par toutes les lignes de son corps pâle
Qu'un bruit tombe, qu'une forme de femme hurle
Se relève en robe immense d'autrefois
Le cou raidi sous la chevelure tordue
Que de cette femme on voie les cuisses, toutes froides
Ses mains remontant l'étoffe splendide en un tas sur son ventre
Pour arriver plus vite, frapper en pleurant quelque chose
Bouche immobile, la petite danseuse
Gonfle ses poumons de musique intérieure
Et passe, intangible
Devant la chanteuse malheureuse et folle
Repasse et continue
Hurlements, vieux rubans lancés loin
Ses mains ne sont pas fatiguées
Elle les fait tourner devant son visage
Aucune trace, ni devant ni plus bas
Ses coudes se plient et se déplient
Une boucle succède à une boucle
Des beaux torses silencieux
Elle sent le clair-obscur labyrinthe
Fait de corps vivants s'ouvrir
[IV. Avant le soir]
pp. 111-2