Anne Perrot :" la concurrence...à tout prix ?" .
"La concurrence...à tout prix ? "Débat avec
Benjamin Coriat, professeur d'économie et membre du CA du collectif des Économistes atterrés et l'économiste
Anne Perrot, membre correspondante du Conseil d'analyse économique.https://www.franceculture.fr/emissions/du-grain-a-moudre/la-concurrence-a-tout-prix
Entre l'avoir, l'être, le savoir, le faire, le paraître et le pouvoir, qui absorbent toutes nos énergies, l'avoir l'emporte aujourd'hui car il donne le pouvoir, permet le paraître, domine le faire et dispense d'être et de savoir.
Edgar Pisani
En France pendant 135 ans (de 1844 à 1969) les brevets sur les molécules thérapeutiques (les médicaments) n'étaient pas autorisés. On a ainsi longtemps privilégié l'accès aux soins du plus grand nombre au moindre coût, aux dépens de la récompense individuelle des inventeurs.
C'est aussi un argument entendu maintes et maintes fois, par exemple à propos des logiciels libres : quelque chose de gratuit/libre/commun...serait moins performant que quelque chose de payant/privé/propriétaire...On entend souvent à propos des logiciels libres que quatre types dans un garage ne peuvent pas faire aussi bien que Microsoft avec des milliards de dollars de budget. Depuis quelques années, on l'entend un peu moins. Linux, Firefox ou Wikipédia ont montré au grand public que, grâce à l'intelligence et aux connaissances collectives d'un grand nombre d'utilisateurs, on peut faire aussi bien qu'avec les outils propriétaires.
Le commun, comme cela a quelquefois été soutenu, ce n'est pas seulement de l’inappropriable auquel on a associé un droit d'usage. L'inappropriable n'est que la forme hyperbolique du commun. Le commun c'est aussi, et c'est le plus souvent, un ensemble de droits partagés.
La notion de "droit naturel" se définit par l'ensemble des droits que posséderait par nature chaque individu du fait de son appartenance à l'humanité [...] Le "droit naturel" s'oppose au "droit positif" édicté par la puissance publique, lequel ne peut être que changeant selon les lieux, les régimes et les époques. Le droit naturel cherche à éviter l'arbitraire du jugement humain. Mais comment ne pourrait-il pas dépendre de l'idée que l'on se fait de la nature humaine, qui peut aussi varier suivant les époques, la géographie et les croyances ?
Plus que le fruit d'un "droit naturel et imprescriptible", notion aux contours plus que discutables, la propriété privée résulte d'une construction sociale et d'une approche politique destinée à permettre à certain d'utiliser un territoire ou une ressource et d'en interdire l'accès à tous les autres. Et ce pour une durée souvent illimitée et transmissible par héritage. Cette naturalisation de l'appropriation et de la transmission de la propriété a pour vocation d'interdire de penser la propriété et donc de lui donner une fonction sociale et politique.
On estime qu'aujourd'hui deux milliards de personnes dans le monde subviennent à leurs besoins quotidiens à travers une forme ou une autre de gestion communautaire des ressources naturelles.
L’intérêt général n'est pas réductible à la somme des intérêts particuliers ou des groupes sociaux.
Ce qu'on appelle commun est donc un principe selon lequel une communauté d'usage choisit de se donner des règles communes pour prendre soin d'une ressource, les met en pratique pour en partager l'usage par une gestion commune, dans le respect des générations futures. En effet, une ressource n'est jamais commune par nature, mais le devient par volonté politique.
En dépit de ses prétentions à divulguer les avancées de la science, le livre de MM. Cahuc et Zylberberg est plus consacré à jeter des anathèmes et à prononcer des exclusions qu'à conduire un débat méthodologique digne de ce nom.