Benny Morris

En 1938, avec en toile de fond la rébellion arabe contre le Mandat, David Ben Gourion déclarait :
« Quand nous disons que les Arabes sont les agresseurs et nous les défenseurs, nous ne disons qu'à moitié la vérité. En ce qui concerne la sécurité et la vie, c'est nous qui nous défendons… Mais cette lutte n'est qu'un aspect du conflit, qui est par essence politique. Et politiquement, nous sommes les agresseurs, ce sont eux qui se défendent."
Ben Gourion avait évidemment raison. Le sionisme était colonisateur et expansionniste, à la fois en tant que mouvement et en tant qu'idéologie

"Pour justifier les violences contre les civils auprès de l’opinion publique locale et internationale, il est indispensable de « déciviliser » cette population. D'où l'utilisation systématique du concept de terrorisme dans les territoires palestiniens occupés : la répression sanglante d'une population est déguisée sous le nom de « guerre contre le terrorisme ». Ce ne sont plus les femmes et les enfants qui sont déchirés par les bombes à fragmentation ; ce ne sont plus des familles entières que l'état de siège condamne à la pauvreté et parfois à mourir de faim : ce sont des terroristes. Même le concept de guerre a son importance : il suggère que face à la cinquième puissance militaire du monde, il n’existe pas une population civile, mais une autre force militaire, et que cela justifie l’utilisation de chars, d’hélicoptères de combat et d’avions de combat. […] c'est la société palestinienne tout entière qui devient l'ennemie ; c'est elle qu'il faut éradiquer « comme un cancer », comme dira le commandant en chef de l'armée, Moshe Yaalon. […] Malgré l'état de siège et les bombardements, malgré tous les morts et blessés, malgré les destructions massives et les coups portés aux institutions civiles et militaires, aucun signe de capitulation n'est visible. La détermination des Palestiniens et des Palestiniennes de toutes tendances s’exprime dans leur volonté obstinée de rester sur place et de mener une vie normale au milieu de la destruction. […] Mais, comme tous les vaillants imbéciles du monde, les généraux israéliens, y compris ceux qui ont abandonné leur uniforme pour devenir ministres, sont convaincus que ce qu'ils n'ont pas réussi à obtenir par la force, ils l'obtiendront en utilisant la force, une force encore bien plus grande

Au cours des sept années du « processus de paix », les Palestiniens ont été témoins de la création de plus de 40 % des colonies juives sur des terres dont Israël s’était engagé à se retirer d’ici cinq ans […] la période d’Oslo est la plus relation coloniale classique envers les indigènes : faveurs, création d'une classe d'intermédiaires pour gérer la vie quotidienne de la population occupée, police indigène pour maintenir l'ordre

Ironiquement, le sionisme, qui voulait faire tomber les murs du ghetto, a créé le plus grand ghetto de l'histoire juive, un ghetto surarmé, certes capable d'étendre durablement son territoire, mais néanmoins un ghetto, replié lui-même est convaincu qu'en dehors de son entre murs, c'est la jungle, un monde radicalement et irrémédiablement antisémite qui n'a d'autre objectif que de détruire l'existence des Juifs, au Moyen-Orient et sur toute la Terre