La pratique du Chan pourrait se caractériser comme une pratique à corps perdu, corps retrouvé. Le corps qu'il s'agit de perdre, de transcender, au besoin en le mutilant ou en l'immolant, est le corps ordinaire, vulgaire "sac de peau" ou "d'excréments" - comme le répète ad nauseam le maître Zen lors de séances collectives de méditation qui semblent consister avant tout à surmonter la douleur physique induite par une position assise prolongée. Le corps qu'on cherche à atteindre, ou plutôt à retrouver, au terme de ces mortifications est un corps glorieux, le corps de Bouddha. D'où la position hiératique de la méditation assise, tout de contrôle. Immobilité, assise parfaite, distance intérieure : le pratiquant se fige dans une posture qui symbolise et anticipe la maîtrise.
Le bouddhisme est essentiellement une école de pensée - un peu particulière toutefois, puisqu'elle débouche sur le non-pensée. Parvenir par le visible à l'invisible, par la pensée au non-penser. Alors que l'Occident cherche à faire exactement l'inverse : réduire l'invisible au visible, ramener l'inconnu au connu, la non-pensée à la pensée.
(La pensée du dehors)
Pour un bouddhiste, la Vie du Maître commence bien avant sa naissance, elle se poursuit au cours de multiples existences antérieures à celle où il connut l’Éveil, et bien après sa mort (ou Parinirvāṇa), avec ses reliques, qui sont une autre forme de sa présence.
De leur point de vue, il n’y a pas à proprement parler de bouddhisme, il n’y a que des bouddhistes. Ou, si l’on veut, le bouddhisme n’est pas une essence, il est ce que les bouddhistes en font.