Notre petit livre a pour objet de remédier à ce grave déficit de connaissances chez des personnes d'ailleurs éclairées. C'est une oeuvre de vulgarisation. C'est bien à tort, que certains hommes de science trop confinés dans leurs spécialité, et dont l'horizon est borné par les murs de leur laboratoire, prononcent avec dédain ce mot de vulgarisation. Trouver la vérité est sûrement faire oeuvre de pie ; mais à quoi servirait la vérité découverte, si l'on prenait soin de la propager, de l'introduire dans le patrimoine du savoir commun ?
En Australie, tous les dieux animaux ne sont pas totémiques; il existe en effet des dieux zoomorphiques n'ayant rien de commun avec les hommes, par exemple, un serpent malfaisant, appelé Nocol, caché dans les étangs, les rivières et guettant les Australiens pour les happer au passage. Enfin il y a des arbres-dieux, qui sont des ancêtres métamorphosés en végétaux; car les dieux australiens sont souvent des hommes divinisés.
Il est certains mots qu'aucun homme civilisé ne saurait entendre avec indifférence ; car il éveillent tout un fond émotif hérité des ancêtres. parmi ces mots auréolés, celui qui tient le premier rang, c'est le mots « justice ». Tantôt cri de guerre, tantôt cri de vengeance, il a cent fois, au cours de l'histoire, servi à résumer les aspirations des opprimés ou la colère des oppresseurs.
Le présent ouvrage est donc surtout un répertoire de documents, par eux-mêmes d'ailleurs curieux et suggestifs. Ces documents, glanés patiemment dans les écrits ethnographes, des voyageurs, des légistes, des historiens, je les ai classés de mon mieux et, comme il est naturel, il m'ont inspiré çà et là des apercus, des inductions, des essais de généralisation.
Le mot « religion », qui résume toules les expressions dérivées, Irop souvent employées pour l'éviter ou le masquer, est un terme extrêmement général, couvrant un assemblage d'idées et de pratiques souvent fort hétérogènes; c'est aussi un de ces mots, que j'ai déjà appelés « auréolés », correspondant à des sentiments à la fois flottants et violents, héréditairement incarnés dans le cerveau de tout homme appartenant à une race civilisée. Pour déterminer nettement la véritable valeur du mot « religion », il faut, de toute nécessité, procédera une enquête ethnographique; mais, dès à présent, nous pouvons fixer à peu près ce qu'on entend habituellement par le mot « religion », même peser la valeur de quelques-unes des nombreuses définitions quien ont été données.
Comme le dil assez le titre de cet ouvrage, mon but n'est pas de faire un exposé complet de toutes les religions, mais bien d'en indiquer l'évolution, en interrogeant successivement toutes les races humaines. Mais ces races elles-mêmes ont évolué; leurs divers types peuvent se ranger en série et chacun d'eux doit avoir des idées religieuses en strict rapport avec son degré de dignité organique. Enfin chaque spécimen d'uni; grande race marque vraisemblablement une phase, une étape, du développement de cette race, et par le seul classement de ces variétés nous avons chance de.découvrir l'évolution réelle, historique, des conceptions religieuses.
A leur tout les phénomènes politiques ont été soumis, dans ce volumes, à une investigation du même genre. À première vu, le domaine politique a un aspect ondoyant, comme la mer, changeant comme les nuées ; mais ce n'est qu'une apparence.
Comme je l'ai déjà remarqué, les primitifs distinguent mal l'homme de l'animal. Les bêtes, croient-ils, sentent, parlent, raisonnent, comme les hommes, et, d'autre part, les sorciers revêtent facilement la forme humaine.
Avant d'entamer l'étude des diverses formes et transformations de la propriété dans les sociétés animales et humaines, il ne sera pas inutile de remonter à l'origine même de l'instinct de la propriété. C'est bien un instinct, un penchant inné et dominateur. Dans l'humanité, il a été le grand facteur de l'histoire; devant lui, se sont docilement inclinées les religions; autour de lui, se sont organisées les sociétés; c'est lui qui a dicté la plupart des codes ; par lui, les empires ont été édifiés et détruits.
Pourtant, dès aujourd'hui, on peut affirmer que les sociétés humaines, quelles qu'elles soit, évoluent suivant certaines règles, résultant de la nature même de l'homme.