La nuque écrasée par le soleil, Léo plisse les yeux. D'un revers de main il essuie les gouttes de sueur piquante qui lui brouille la vue. Là-bas, plus au large, c'est le cap d'Erquy, presque invisible derrière un rideau de chaleur. Immuable. Il jette un dernier coup d'oeil à l'entrée du port du Légué sur sa droite, avant de s'avancer vers le 13 rue du Phare.
Tu sais, comme ils s'imaginent les paysans, les mecs de la ville, les bobos. Des ploucs, des taiseux qui passent leurs journées avec leurs bêtes, qui parlent qu'à elles, qui se pochetronnent tranquillement en rêvant de se taper la vache parce qu'ils n'ont pas de bobonnes à la maison. Sales et crevards.
La nuit surtout, il s'éveillait d'un coup, cherchant sa respiration, avec la sensation d'avoir été tiré d'un puits au fond duquel il se noyait. Son cœur était sur le point d'éclater et il se noyait corps et biens... Cette nuit-là, c'est un bruit come le claquement d'un coup de feu qui l'a tiré du sommeil. Il a palpé l'oreiller à son côté pour y chercher Laura mais n'y a trouvé que du vide. Pas d'odeur, même pas l'empreinte d'un corps. Rien. Il lui a fallu un bon moment pour remettre les choses en place. Et se souvenir qu'elle ne pouvait pas être là. Elle ne restait jamais.
Je ne sais pas pourquoi tu pleures
Tu ne sais pas de quoi je meurs.
Un long silence chargé de toute leur histoire. Même si une inquiétude les taraudait l'un et l'autre. Une inquiétude qui avait nom Laura. Ou Querrien. Ou comment vivre.
L'alambic de la nuit distille les étoiles.