Denise Chalem

- Il te reste pas un cachet ?
- Maintenant ?
- Après chaque parloir, je suis rincée...
- Attends un peu... [...] Tiens. Un seul. Pourquoi tu ne veux jamais que tes gosses viennent te voir ? Ça te ferait du bien.
- Du bien ? D'abord il faut qu'ils se cognent trois cents bornes. Une fois ici, ça leur est arrivé parfois de poireauter deux plombes avant de me voir. Et quand on était ensemble, au bout de trois quarts d'heure, au revoir et à la prochaine. Au début que j'étais là, ils avaient même pas le droit de me refiler leurs dessins. Ils repartaient en chialant. Non... J'ai préféré zapper.

[ deux codétenues d'une cellule ]
- Ce qu'il nous faudrait, c'est être un peu seules.
- Tu as raison. Moi, au début, j'ai demandé à être en cellule d'isolement. Au bout d'un mois je prenais mon café devant la glace pour me faire croire qu'on était deux.
- Excuse-moi.
(p. 42)

- Et le ski ?
- Quoi le ski ? C'est fini le ski.
- C'est comment ?
(Caroline se dandine sans enthousiasme.)
- Comme ça. Comme ça. Et puis comme ça, voilà.
- Fais-moi le ski.
- Ben après tu fais la queue et tu prends un tire-fesses. (Elle prend le balai-brosse qu'elle coince entre ses fesses. Elle arpente la cellule en mimant le ski.) On monte. On descend. On remonte. On redescend. On remonte. On redescend. Je continue ?
- C'est vraiment nase, les riches. Faire la queue pour se mettre des trucs dans le cul et raquer en plus. Faut pas être fini.