Didier Dillen

Levrette superstar? Voilà en tout cas une façon d'aimer qui laisse peu de monde indifférent. La brouette folâtre ne fait pas pour rien partie du top 3 des positions amoureuses prétérées des Français. Et pas seulement d'eux, d'ailleurs. Pourtant, et aussi incroyable que cela puisse paraître aujourd'hui, les approches postérieures n'ont pas toujours été aussi populaires. Pire, elles feront l'objet, des siècles durant, d'une incroyable série de tabous religieux et moraux. Formellement interdit par le clergé, puis par les médecins et moralistes de tous poils, le tournedos lubrique est tour à tour accusé d'être un péché mortel, de donner naissance à des enfants malformés, d'empêcher la conception, de dévergonder les épouses ou d'exciter la concupiscence des maris ! I faudra la perte de l'influence de l'Eglise, les progrès de la sexologie moderne et les prémices de la révolution sexuelle pour faire revenir cette position torride sur le devant de la scène: dans les bordels d'abord, dans les chambres à coucher ensuite !

Dans "les Joies de Lolotte", du si sulfureux Nerciat, l'héroïne s'apprête visiblement à recevoir une initiation au libertinage amoureux. Que découvre t'elle sur le lieu de ses futurs exploits ? Une pièce comportant plus de deux cents petits cadres sur lesquels s'étalent les images de "tout ce qu'il y a de connu en fait de fouterie et toutes sortes de caprices". Qui dit mieux ? L'incontournable Sade, bien entendu ! Il dresse, avec "Les cent vingt journées de Sodome", un minutieux classement des diverses débauches et perversions existantes, et finit par en recenser pas moins de six cents. Certains regrettent pourtant qu'il n'y en ait pas plus encore. L'abbé Gagliani, un des personnages du roman "L'espion dévalisé" de Baudouin de Guémadeuc, se vante d'avoir mis en pratique au moins vingt sept postures avec vingt sept filles différentes. Mais il déplore le malheur de ne point être né en Chine, car les Chinois ont, dit il "des méthodes à l'infini pour prolonger, exciter, rappeler les voluptés ...".
Dans "Ma conversion ou Le Libertin de qualité", Mirabeau prétend ainsi être l'inventeur d'une série de techniques amoureuses tout à fait originales.

Paru dans "Elle" (croquis à l'appui)
La levrette est au sexe ce que Michel Drucker est à la télévision, indémodable, classique. Et ce n'est pas sa pénétration optimale qui nous fera dire le contraire. Si les clitoridiennes n'hésiteront pas à demander un coup de main (ou de doigt) pour accélérer l'extase, les autres ne bouderont pas leur plaisir.
Et même votre partenaire en profite, 100% plaisir.

On s'empresse de condamner la levrette, précisément parce qu'elle ravale l'homme au rang de l'animal et contrevient à sa nature d'être humain ! Allez comprendre.
La vie intime des chrétiens ne devait donc pas être simple au Moyen Age. Encore que rien ne permet de penser que ces continuelles injonctions aient toujours eu l'effet escompté. A commencer au sein du clergé lui-même. Au Moyen Age, et malgré la réforme grégorienne qui vise à imposer le célibat des clercs, les prêtres mariés ou vivant en concubinage ne sont pas rares, de même que les prélats à la sexualité débridée et cousus de maîtresses. On n'est guère plus sages dans les couvents où se nouent des amitiés très particulières entre moines ou nonnettes.

Henri Duc d'Orléans futur Henri II se marie en 1533 avec Catherine de Médicis
Ils n'arrivent pas à procréer et usent de tout un tas de remèdes possibles et inimaginables pour tenter de concevoir un enfant. Elle ceint sa taille d'une ceinture de poils de bouc trempés dans du lait d'anesse, porte autour du cou un sachet renfermant des cendres de crapaud. Elle refuse de voyager en mule par crainte de voir la stérilité de l'animal lui être transmise. Elle a aussi recours à toutes sortes de remèdes composés des ingrédients les plus farfelus : corne de licorne et ivoire pilés, mélange de lait de jument, de sang de lapin et d'urine de brebis, gousse d'ail mise à macérer dans le vagin pendant des heures et on en passe.
Henri se voit proposer divers remèdes tout aussi improbables. On lui conseille notamment pour allonger son membre viril de frotter celui-ci d'un onguent composé d'huile de castor, de vers de terre et de lait de chèvre fermenté. Comme on s'en doute rien n'y fait.
C'est alors qu'intervient Jean Fernel, médecin réputé du siècle.
Il diagnostique chez Catherine une rétroversion de l'utérus et chez Henri une malformation du pénis connue sous le nom d'hypospadias. L'ouverture de son urètre ne se situe pas à l'extrémité de son pénis, mais sur la face inférieure de la verge. Son pénis est de surcroît complètement tordu.
Fernel y voit la cause principale de l'infertilité du couple. Il leur conseille d'abandonner le missionnaire et de pratiquer une position qui passe à l'époque comme plus propice à la conception la levrette.
Les conseils de Fernel porteront leurs fruits.
En 1543 Catherine donnera naissance à son premier enfant François II ; elle en aura neuf autres par la suite .
Voilà donc une levrette dynastique qui a changé le cours de l'histoire.

Cela dit, aujourd'hui encore, l'être humain est loin d'être le seul à afficher un répertoire érotique et sensuel non limité à la reproduction. La fellation est ainsi pratiquée par les bonobos, les chimpanzés, les macaques et même certaines chauves-souris. Le cunnilingus l'est par les chimpanzés et les gibbons, et la masturbation mutuelle par les bonobos femelles ou les dauphins. Quant au missionnaire, il est régulièrement mis en pratique là aussi par les bonobos (surtout les jeunes individus), les gibbons et occasionnellement par les gorilles.

La figure de l'hérétique prend peu à peu le visage de la sorcière. Les ouvrages de démonologie prêtent à celle-ci une sexualité débridée, un "vagin insatiable". Les sorcières sont vues comme des "putains incapables d'être rassasiées". Les sabbats qu'on leur reproche d'organiser sont décrits sous la forme de véritables orgies sexuelles au cours desquelles des hommes et des femmes s'envoient en l'air sans retenue. Des croyances veulent aussi qu'ils s'accouplent tantôt avec des démons mâles ou femelles, les fameux incubes et succubes, tantôt avec le diable lui-même, dont le sexe est raide et immense et dont la semence est, dit on, froide comme le givre !

Que sait-on de la vie amoureuse des hommes et des femmes préhistoriques ? S’envoyaient-ils seulement en l’air ? Oui, sinon nous ne serions pas là pour en parler ! Mais à quoi pouvait bien ressembler le Don Juan des cavernes ? À un genre de King Kong avec un peu moins de poils ? C’est en tout cas l’image que des dizaines de livres, films ou BD ont contribué à donner de notre lointain ancêtre. Côté pilosité pourtant, on repassera. Sur les nombreux vestiges laissés par l’art paléolithique, les hommes sont en général représentés cheveux courts, sans moustache, ni barbe, ni touffes sous les aisselles et encore moins aux endroits stratégiques. S’épilaient-ils ou se rasaient-ils ? Mystère et silex taillé. Une chose est sûre, Cro-Magnon et Cro-Mignonne étaient habillés de façon bien plus recherchée que les protagonistes du film La guerre du feu. Oubliez donc le slip et le cache-seins en peau de renne bouffés aux « mythes ». Oubliez aussi l’image du séducteur préhistorique qui conte fleurette à sa « conquête » à coup de gourdin et la tire ensuite par les cheveux pour l’emmener dans la caverne conjugale. Bien sûr, on ne sait quasi rien des coutumes matrimoniales du Paléolithique. Néanmoins, en étudiant le mode de vie des dernières tribus de chasseurs-cueilleurs de la planète, on a de bonnes raisons de croire que les jeunes hommes quittaient par exemple le clan pour gagner d’autres groupes et y trouver des épouses, à l’instar de ce qui se passe aussi chez certains animaux. Les cas de violence, conjugale ou pas, sont d’ailleurs quasi inconnus au Paléolithique, preuves archéologiques à l’appui.

Ces manuels mettent par exemple l'accent sur les préliminaires et sur la capacité du partenaire masculin à amener sa compagne à l'orgasme .
Certains recensent ainsi quatre dispositions fondamentales et vingt six variantes parmi lesquelles le ver à soie tissant son cocon, le dragon qui s'enroule, le tigre blanc qui bondit. Ce qui est tout de même plus poétique que missionnaire ou levrette !

Fessebook et levrette claquée

On trouve décidément de tout sur Facebook. En 2010, on pouvait notamment y dénicher une étonnante "Amicale de la levrette claquée" ! Pour ceux qui ne connaissent pas encore cette déclinaison du rétro-coït, il s'agit tout simplement d'une levrette classique assortie, au moment opportun, d'une ou plusieurs claques sur les fesses ! Il y en a qui aiment.
La preuve, ce groupe culte comptait à l'époque plus de sept cents membres, et pas seulement masculins et turgescents. Précisions que cette variante de la fessée érotique requiert bien évidemment le consentement du partenaire "claqué".