Editions L`artilleur

Ouvrage collectif qui ne mentionne pas les noms des contributeurs !... On ignore donc qui parle: le mari de la coiffeuse, la femme du boulanger, le club des cinq, les sept petits nains ou les sept salopards ou... une seule et même plume?... C'est un sérieux problème. À ma connaissance, un cas unique.



Il y a vingt ans déjà, Les Territoires perdus de la République (Fayard, 2002) faisait le constat en Seine-Saint-Denis d'un aveuglement et d'une inertie politique devant un antisémitisme - galopant et décomplexé, revendiqué même - dans les écoles, au sein d'une communauté maghrébine de plus en plus séparatiste.



Dans ce collectif - étrangement anonyme et peut-être pas si collectif - sur l'islamisation de la France, le constat porte cette fois sur l'ensemble de la société française et prend en compte les musulmans de toutes origines: deux décennies après Les Territoires perdus de la République, rien ne semble avoir changé et on voit, une fois encore, comment les valeurs démocratiques d'accueil, de droit à la différence (brandi, par exemple, pour défendre l'excision et l'infibulation!), de liberté de culte, d'expression, etc. sont dévoyées par la classe politique et les ONG, à l'occasion avec le soutien de prétendus experts (tel cet ethnopsychiatre pro-mutilations sexuelles chez les fillettes africaines: Tobie Nathan); nos valeurs démocratiques servent en fait un communautarisme islamique déterminé et la non-intégration de la population musulmane; pour les islamistes, elles sont la voie royale de leur entrisme et de sa stratégie de repli identitaire.



C'est évidemment effarant et bien sûr cela doit changer: deux civilisations (puisqu'il s'agit bien de cela) ne peuvent pas vivre ensemble si l'une rejette l'autre, parfois très violemment et presque en toute impunité (le fameux "choc des civilisations", visionnaire, annoncé il y a trente ans par Samuel Huntington). Toutefois, quelque chose dans le livre m'a dérangé, embarrassé même: un racisme et une xénophobie (totalement absents dans Les Territoires perdus de la République) qui affleurent un peu partout sans dire leur nom.



Une impression purement personnelle?...



Un livre qui dénonce sans problématiser et, à ce titre, n'évite pas une forme de diabolisation stérile et contre-productive. Une littérature très à droite (plébiscitée sur la première de couverture par, entre autres,... Valeurs Actuelles).



Mais une chose est sûre: il n'est besoin d'être ni de droite ni d'extrême droite pour s'inquiéter de ce que quiconque est dénoncé sur les réseaux sociaux comme critiquant, d'une façon ou d'une autre, l'islam risque maintenant sa vie (entre autres: Charlie Hebdo; Samuel Paty; les menaces de mort adressées en début d'année à la chercheuse Florence Bergeaud-Blackler, autrice de le Frérisme et ses réseaux, et depuis sous protection policière; etc.).



Aussi, malgré un certain manichéisme, ce livre s'imposait-il, car la peur s'est installée chez nous. À charge du lecteur de combler ensuite les lacunes du livre et de s'informer pour comprendre et ne pas s'engouffrer dans le racisme antimusulman et les solutions radicales: pour que l'émotion ne court-circuite pas la pensée.



Ainsi, par exemple, se demander à quelles conditions l'islam pourrait se réconcilier avec la démocratie... À ce sujet, on pourra lire, parmi une littérature innombrable: Philippe d'Iribarne: L'islam devant la démocratie (Le débat, Gallimard, 2013); et Hamadi Redissi: Une histoire du wahhabisme (Point, 2016). Ou encore, l'étude de Razika Adnani pour Fondapol: Maghreb : l'impact de l'islam sur l'évolution sociale et politique (https://www.fondapol.org/etude/maghreb-limpact-de-lislam-sur-levolution-sociale-et-politique/).