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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
« Ce que vous voulez vraiment me dire, Monsieur, c’est que ma mère m’a complétement oublié ? »
Spencer déglutit avec difficulté et, devant ce regard éperdu et ce visage blême, la compassion qu’éprouvait le solicitor des Storace pour ce fils du côté gauche redoubla.
« On ne peut l’assurer nettement, répondit avec précaution Joseph Burchell. Je puis juste vous apprendre que l’acte par lequel vous deviez être désigné principal légataire de votre mère demeure introuvable. Elle en a parlé à des amis de confiance, le fait est bien certain. Pour le reste… Peut-être avait-elle seulement envisagé de tester.
— N’en suis-je pas moins son fils ? s’exclama le garçon rudement. N’ai-je pourtant pas droit à ce qu’elle me destinait ?
— Nul ne doute de votre filiation, mon garçon, toutefois… Votre situation particulière… »
Le juriste s’interrompit. Exposer à un fils accablé par son deuil qu’on ne reconnaissait aucune existence aux bâtards, du moins en matière successorale, l’enchantait modérément : quelles que fussent les espérances de ces enfants nés hors mariage, leurs droits dépendaient exclusivement de leur mention expresse sur les testaments de leurs parents.
Il le fit pourtant.
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[Nancy Storace] fut très probablement une musicienne expressive doublée d’une excellente technicienne, et ce qu’on appellerait aujourd’hui une « bête de scène ». Sans être une beauté reconnue, elle séduisait également par son charisme, sa bonne humeur et sa vivacité, traits dont Mozart tira profit pour peindre une Susanna sans doute assez proche de la personnalité de sa créatrice. Dès le lendemain de son décès, on pouvait lire ces lignes dans un quotidien anglais : « De ses talents professionnels comme chanteuse et actrice, il n’est pas nécessaire de parler. Ils faisaient les délices et l’admiration du public, et assurément, elle était insurpassée dans son style. » Si cet hommage a l’avantage de la brièveté, il ne rend compte que très imparfaitement du plaisir qu’éprouva un public venu en nombre pour l’applaudir.
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Le temps s’abeausit ; le voyage n’en sera que plus aisé, pensa la Storace tandis qu’elle se contemplait sans indulgence dans le grand miroir de sa loge. Ses yeux bruns et larges conservaient toute leur séduction malgré l’examen sévère qu’elle faisait de sa personne. Elle s’attarda sur le long nez un peu fort, sur l’olivâtre de son visage ovale, sur la bouche charnue et vermeille si séduisante par ses promesses implicites. Ses lèvres s’entrouvrirent, s’arquèrent, coins relevés, rompant son immobilité.
Queue de sa robe retroussée pour ne pas la piétiner, Ann Selina Storace recula d’un pas. La surface polie lui renvoya, dans le miroitement ambré des chandelles, l’image d’une courte silhouette vêtue de blanc filigrané d’argent et de bleu flatteur, dont l’embonpoint naissant ne se manifestait plus que par des fossettes appelant les baisers. Elle en usait habituellement avec alacrité. Tout comme des œillades, d’ailleurs. L’échafaudage savant de la coiffure, couronné d’une plume impertinente qui frisait autant que ses yeux, lui conférait une prestance faisant mentir les dons de la nature. Mais ce que sa personne devait à l’illusion était immédiatement contredit par la vivacité que la jeune femme de vingt-deux ans entretenait soigneusement tant à la scène qu’à la ville, donnant à ses moindres gestes l’effronterie légère d’une fauvette aguichante — un naturel redoublé par ses emplois au théâtre. Car Ann Selina Storace, "prima buffa" sur le départ de la troupe d’opéra italien de Vienne, chantait les premiers rôles de soubrettes, cruciaux dans le répertoire comique qu’elle affectionnait, et dans lequel elle s’était taillée une réputation continentale.
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[Mémoires de la Storace]
Avant son départ pour la Russie, Sarti m’accompagna chez les Mozart. La visite fut très-gaie ; ce qui l’enchanta par-dessus tout fut une série de variations que Mozart lui joua sur son Aria "Come un agnello". Je m’embarrassais désormais autant de mon préjugé contre Mozart que des neiges d’antan ; voici par quel agent j’étais revenue de mes préventions à son égard.
J’avais fait parfaite connaissance du Maestro Mozart lors d’une Académie chez la Comtesse Hxtzxxxd. Maestro Vanhall & le Baron Dittersdorf y étaient pareillement conviés. Cette société était fort brillante, formée de gens de Talent & d’Esprit. Kelly voulut bien me donner le bras pour m’y conduire, le Dr. Fisher ayant dédaigné cet honneur, à mon allégresse la plus vive. Les gens de Génie pouvant toujours converser sans gêne, cette compagnie était supérieure à bien des soupers en Europe.
Mozart se rendit à nos prières & il joua pour nous, avec une rapidité, une inspiration qui étonnèrent. Son jeu était moins brillant que celui de ces virtuosi qui surprennent sans émouvoir, mais il était incomparable dans son expression ; vraiment, il faisait chanter l’ivoire. Déjà placé au premier rang comme claviériste — encore que certains puissent lui préférer Clementi —, il s’était depuis illustré comme compositeur d’Opéra. À Londres Linley le Jeune, frère de Mrs. Sheridan, lequel avait autrefois noué amitié avec Mozart en Italie, avait rapporté fidèlement ses mérites ; je fus néanmoins surprise de la vigueur & de la sûreté de son jeu.
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[Alfred] Einstein a également émis l’hypothèse selon laquelle Mozart et la signora [Storace] se seraient écrits par la suite. Cette affirmation a eu un tel retentissement que nombreux sont ceux qui évoquent désormais une correspondance suivie entre Mozart et la cantatrice . Ils disent même que cette dernière aurait détruit les lettres, juste avant de mourir, ou se serait faite enterrée avec !
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