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Citation de ChedevC


Prologue (p 7/8/9)
Le 9 août 1969, Sharon Tate, l’épouse du cinéaste Roman Polanski, et quatre de ses amis sont assassinés dans une villa hollywoodienne située au 10050 Cielo Drive, sur les hauteurs de Los Angeles.
À l’époque, apogée du « Flower Power », la sauvagerie de ces meurtres transforme en une nuit une
Amérique insouciante, libertaire et fervente de contre‑culture en une société conservatrice et anxiogène. L’assassinat de Sharon Tate, enceinte de huit mois, détermine dans le sang la frontière qui sépare l’avant de l’après des sixties. Le pays tout entier se réveille alors comme après un « bad trip ». Le mouvement hippie s’effondre brutalement et les derniers adeptes du fameux «  Peace and Love » apparaissent aux yeux du grand public comme les fantômes de Charles Manson, des suppôts de Satan. Le cinéaste Roman Polanski écrit dans ses mémoires : «Avant les meurtres, je n’avais jamais songé que les hippies pouvaient représenter un danger. Au contraire, je voyais en eux un phénomène qui nous avait tous influencés et avait modifié notre vision de la vie.
[...] La mort de Sharon est la seule ligne de partage qui ait réellement compté dans ma vie».
Si les jeunes gens d’aujourd’hui ne connaissent pas – ou si peu – la tragédie qui, le 9 août 1969,
a endeuillé la quasi‑totalité de la planète, il est étonnant de remarquer que cette même jeunesse
est attirée, voire fascinée, par les années 1960 et tout particulièrement par celles qui ont clos la décennie. Il existe en effet parmi la génération des vingt‑trente ans une curiosité certaine pour cette époque qu’ils auraient voulu connaître. À leurs yeux, elle est cette parcelle de temps où l’individu – à tort ou à raison – s’est épanoui et a su, par la contre‑culture, se libérer des chaînes du conformisme et faire fi des conventions.
En août 1963, Martin Luther King, leader charismatique de la lutte en faveur des minorités ethniques qui prônait la désobéissance civile pour combattre l’injustice, déclarait dans un discours prononcé au pied de la statue de Lincoln, à Washington, avoir «fait un rêve». Il a ainsi renforcé l’idée selon laquelle tout était possible au pays de l’oncle Sam. Puis le mouvement de masse récusant la guerre du Vietnam a justifié la contestation tandis que, sur le campus de Berkeley, en Californie, la révolution estudiantine diffusait la pensée du Free Speech Movement, qui s’est répandue jusqu’en Europe et a influencé les têtes blondes de mai 1968.
Tous ces événements ont donné une «morale» à l’indocilité et à la rébellion de la jeunesse, aussitôt
relayées par la littérature, le cinéma et la musique.
Dès lors, l’idée que tout est permis («Il est interdit d’interdire») a conduit à la libération sexuelle, à l’usage des drogues comme moyen d’introspection pendant que le rock’n roll et la pop musique véhiculaient l’idée qu’une société nouvelle était née. Un rêve ou un mirage que les jeunes d’aujourd’hui, coincés entre le politiquement correct, la bien‑pensante et un retour au conservatisme, auraient voulu connaître.
La tendance actuelle érigée en véritable mode, nommée «vintage», le retour du vinyle et la nostalgie du pop‑art sont, sans doute, les discrètes manifestations de cette nostalgie.
Si l’assassinat de Sharon Tate marque la fin des sixties, la fin des idéaux symbolisés par la vie communautaire dont les dérives ont façonné le monstre Charles Manson et les membres de sa
«famille», cette tragédie sanglante reste néanmoins, dans la mémoire collective, une sorte d’opéra onirique illustrant, dans un ultime soubresaut, les chimères d’une génération disparue. C’est ce phénomène de rupture, souligné par Roman Polanski, unique dans une civilisation occidentale contemporaine, qui mérite d’être examiné grâce à un récit fondé sur des témoignages, alimenté par les archives documentaires et la description «froide» des événements survenus en août 1969. Un récit jusqu’à l’épicentre d’une folie meurtrière où se cachait la genèse d’un mal qui a effrayé le monde entier pour devenir le point d’orgue d’une époque et de s’inscrire, à jamais, dans les annales criminelles et judiciaires des États‑Unis d’Amérique.
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